[ 19 Mai 1943 ] La chasse est ouverte ! [ Pv. Terrence Levy ]

Cette nuit particulière avait commencé comme toutes les nuits particulières de Terrence, c'est-à-dire enfermé dans une boîte à chaussures dans l'armoire d'Elizabeth Levy protégée autant par de puissants sortilèges que par la réputation de terreur de la Levy. Personne n'avait l'autorisation d'approcher de cette armoire, aussi était-ce le meilleur endroit où planquer un petit frère temporairement réduit à l'état de batracien gluant et baveux. Bien que le dit petit frère fusillait du regard sa soeur, grande responsable de ce maléfice qui refusait de disparaître avec la puberté, comme l'avaient pourtant promis les guérisseurs de Sainte-Mangouste, Terrence n'avait guère le choix d'accepter de faire confiance à sa soeur au moins le temps qu'il fallait pour retrouver ses esprits et son corps de jeune garçon.

En deux ans, il n'y avait eu aucun problème : Elizabeth s'étant montrée étonnamment fiable chaque mois. Elle rejoignait son frère derrière la statue de Salazar Serpentard à minuit la nuit de la nouvelle lune, attrapait le batracien en un tourne-main né de l'habitude et le flanquait dans une boîte jusqu'aux premières lueurs du matin. La crainte de voir le nom des Levy ternit par ce secret honteux l'empêchait probablement de manquer à sa parole, bien que l'envie devait la tenailler. S'il n'avait pu s'empêcher de remarquer qu'elle oubliait régulièrement de lui laisser des vêtements dans l'armoire, Terrence n'en avait jamais soufflé mot. La première fois, il avait ravalé sa fierté en se glissant le plus discrètement possible dans son dortoir, les fois suivantes, il avait simplement aménagé une cache de sa confection dans la salle commune.

Alors qu'avait-il bien pu se passer en cette nuit du 18 au 19 mai 1943, une vengeance? une réelle négligence? Toujours est-il que l'armoire n'avait pas été bien scellée par les sortilèges habituels, pire, la porte était même restée entrouverte... Il ne s'était donc passé que trois heures et des poussières avant qu'un crapaud de bonne taille surgisse de l'armoire en coassant et en cherchant quelque chose à manger. Il avait parcouru quelques centimètres dans une direction, quelques centimètres dans une autre, avait fini par bondir sur une table basse et n'en bougeait plus, ses yeux aux aguets. Son apparente immobilité ne le sauverait pourtant pas de la terreur en rose qui s'approchait à présent de lui, baguette pointée.

La petite lueur en mouvement attira immédiatement l'attention de Crapaud-Terry qui le confondit avec une appétissante luciole. La langue du batracien claqua dans l'air pour capturer la lueur et l'attirer dans la bouche grande ouverte du crapaud, lequel initia presque en même temps un mouvement pour fuir les deux mains qui se tendaient dans sa direction.

La chose sur sa langue n'avait finalement rien d'un insecte comestible, mais une fois sa langue enroulée autour de sa proie, il était plutôt malaisé de l'en déloger, encore plus quand on avait une terreur en rose à ses trousses. Le crapaud trouva d'abord refuge sous une table. Rien ne bougeait près de lui, il en déduisit qu'il était en sécurité.

Puis une masse sombre se découpa près de lui et le cerveau du crapaud lui cria de fuir. Aussi fut-ce par bonds puissants qu'il s'éloigna de la menace, mais il ne parvenait pas à semer sa poursuivante et aucune mare ou cachette ne se présentait à lui pour assurer une fuite efficace.

L'obscurité ne posait pas de problème particulier au crapaud, semblait-il. Sa vision nocturne lui permettant même de s'orienter dans cette pièce aux dimensions impressionnantes, mais à l'atmosphère particulièrement humide et plaisante. Il finit par franchir sans le savoir les limites de la salle commune et par se retrouver dans un long couloir. La fuite devenait encore plus importante dans cet espace dégagé. Le sol de pierre ne lui plaisait pas, pas plus que l'absence de toute cachette. Le crapaud continuait de bondir sans fatigue apparente, la baguette toujours en gueule.

Au bout d'une dizaine de minutes cependant, le crapaud fut contraint d'arrêter, le sol paraissant se dérober devant lui. Un escalier représentait une toute nouvelle équation que le batracien devait évaluer avant de se jeter vers l'avant. Quand il fit son bond sur la première marche, la terreur en rose n'était plus qu'à quelques pas derrière lui. Quelque chose le stoppa pourtant sur la deuxième marche, et une ondulation parcourut sa peau recouverte de verrues. Étrangement, la baguette éteinte se remit à émettre une faible lueur par intermittence.

[Je suis une patate. Désolée.]

Bien sûr, si la baguette que tenait le batracien entre ses lèvres vertes se rallumait par intermittence, c'était qu'il se passait quelque chose de magique dans le coin, et plus précisément sous la peau verte de l'animal à sang froid. De fait, le sang qui circulait dans ces veines-là était de moins en moins froid, et l'ondulation qui parcourait la peau, faisant disparaître les verrues une à une, n'avait plus grand-chose de naturel.

À présent totalement indifférent aux cris et piaillements de la forme qui le pourchassait quelques instants plus tôt, mais s'agrippait maintenant à l'escalier comme si sa vie en dépendait, le crapaud n'avait plus aucune inquiétude ni peur en tête. Son instinct avait cessé de lui hurler de déguerpir, et des pensées de plus en plus cohérentes se formaient dans ce cerveau.

C'était d'abord des pensées de soulagement à l'idée de reprendre forme humaine, puis des pensées agréables qui lui rappelaient la douce chaleur qu'il retrouverait bientôt en allant rejoindre son lit, puis des pensées pratiques en songeant qu'il lui fallait pousser la porte et s'extirper de l'armoire avant de risquer de se transformer à l'intérieur. Mais ces pensées-là s'interrompirent en plein milieu quand la main à trois doigts, encore un peu verte, mais plus du tout pustuleuse, ne rencontra pas le bois d'une armoire mais le froid de la pierre. Ses hanches n'appuyaient pas non plus sur les contours de l'armoire comme lors de sa première transformation, où il s'était presque retrouvé coincé le derrière dans l'armoire. Non, ce qui l'entourait avait toutes les allures d'un escalier. Et là les pensées prirent une tournure plus radicales, plus précises encore, et toutes orientées vers une seule cible : Elizabeth.

Elizabeth qui avait dû voir en cette unique faiblesse de son frère l'occasion de prendre sa revanche sur une certaine discussion en grande salle. Elizabeth qui ignorait sans doute encore à quoi elle s'attaquait maintenant que son frère avait deux pleines années d'études à Poudlard dans le corps et un accès quasi illimité à une réserve d'ingrédients dangereux grâce à son travail à l'herboristerie. Elizabeth qui... n'était étrangement pas sur les lieux de son crime pour profiter de l'embarras dans lequel elle avait mis son frère.

Au moment même où l'esprit redevenu totalement humain de Terrence s'en étonnait, le garçon reçut un coup de massue sur le crâne. La masse dont il absorba tout le choc faillit l'entraîner dans une chute, mais puisque le Serpentard se trouvait déjà en bas des marches, il n'y eut aucun mal, ou presque. En se massant douloureusement le crâne et le coude droit, Terrence jeta des regards furieux à ce qui l'attaquait ainsi. D'un mouvement brusque qui lui envoya une décharge électrique dans le bras droit, il repoussa son assaillant en chemise de nuit et en pul débraillé.

"Pousse-toi de là! Qu'est-ce qui te prend?!" s'exclama-t-il d'un ton emporté qui ne cadrait pas du tout avec sa réserve habituelle. Le mouvement fit tomber quelque chose sur sa poitrine, chose qu'il rattrapa par réflexe et qui se révéla être une baguette, pas la sienne. Le mouvement lui rappela également qu'il était entièrement nu, dans un quelconque couloir de l'école, en pleine nuit, AVEC QUELQU'UN et, l'horreur se fraya un chemin dans son cerveau tandis que le garçon se liquéfiait intérieurement, quelqu'un qui se révélait être du sexe opposé. Il plaqua ses mains sur son bas-ventre, protégeant sa dignité, mais n'en lâcha pas pour autant la baguette, celle d'Atria, évidemment, pas la sienne, celle-là, il la cachait de son autre main.

Ça aurait pu être pire, se répétait mentalement Terrence, qui se demandait toutefois du même élan COMMENT ça aurait pu être pire puisque franchement, s’il avait eu à décrire un scénario catastrophe l’impliquant malheureusement lui dans le rôle principal, il est fort probable qu’il aurait à peu près décrit la situation présente. Mais… ça aurait pu être pire, se répéta encore une fois le garçon, la main gauche bien sécurisé sur son bas-ventre et la main droite sécurisant la main gauche qui sécurisait le bas-ventre. Une double couverture n’était pas de trop en les circonstances. De fait, Terrence n’aurait pas été contre une deuxième paire de mains pour dissimuler tout ce que sa nudité totale ne laissait pas à l’imagination.

Oubliées les douleurs au crâne et au coude droit. Envolés les plans de vengeance contre sa grande bécasse de sœur. Restait la très problématique et fort embarrassante situation actuelle : lui nu, un couloir quelque part dans le château, une fille de sa maison et la possibilité croissante que d’autres élèves finissent par tomber sur eux. À tout le moins, le verracrasse qui lui servait de sœur ne se trouvait pas dans les parages. Si tel avait été le cas, elle aurait déjà surgi de sa cachette en brandissant des photos accablantes. Terrence n’en tenta pas moins de se recomposer une dignité.

Levy, il était un Levy par le nom et par le sang. Et il dominait pour le moment la fille, qu’il avait fait tomber au sol. Mais elle se redressait lentement, il allait falloir agir, ne pas la laisser prendre le contrôle de la situation. Il semblait toutefois que la longue nuit et la métamorphose en ce lieu inconnu avaient eu raison de son sang-froid. Son leadership naturel lui échappa temporairement lorsque la fille se mit à parler et à parler et à parler encore, avec une gentillesse molle de Poufsouffle qui ne cadrait ni avec le lieu ni avec le blason qui ornait ses uniformes.

Ce qu’elle disait n’avait ni queue ni tête en plus. Elle baragouinait un salmigondis de contes de fée moldus et d’exigences qui ne seyait guère à une fille. Si la confusion entre Terrence Levy et un prince était tout à fait crédible (quoique le charmant restait encore à prouver), il n’y avait aucune méprise possible sur une potentielle situation maritale : un Levy ne marierait jamais quelqu’un de la famille bâtarde des FitzRoy, qui n'avait de Sang-Pur que la prétention. En l'occurrence, les cheveux roses d'Atria dérangeaient plus Terrence que le reste. Le garçon de deuxième année plissa les yeux, sans lâcher la baguette de sa poursuivante.

À partir de maintenant, il y avait deux options : ou bien il continuait à tenter de se cacher, comme un garçon ou bien il devenait un homme et assumait… eh bien tout ce qui venait avec. Sa mère lui avait déjà dit plus d’une fois qu’il suffisait de faire les choses avec grande confiance pour que les gens oublient tout le reste : hésiter, remettre son autorité en doute, répliquer, poser des questions. Terrence décida que le moment était venu de passer de la théorie à la pratique et de devenir un homme.

« J’ai déjà un costume. J’ai même le nœud papillon qui va avec. Il me fait très bien. »

Sur ces mots et un demi-sourire, il cessa de menacer la fille de sa propre baguette et examina l’outil de plus près. Bois d'ébène. « C’est un crin de licorne dedans? » Il n’attendit pas la réponse. « Ça devrait le faire. Donne. » Et sa main gauche quitta la région qu’elle dissimulait vaillamment jusque-là pour se saisir du pull gentiment tendu par Atria. Terrence avait redressé la tête et carré les épaules, levé le menton et adopter son meilleur ton autoritaire même s’il était à présent et vraiment flambant nu dans un couloir face à une fille qui pouvait absolument tout voir de sa personne, jusqu’au grain de beauté qui lui ornait l’intérieur de la cuisse gauche.. et ce qui se trouvait juste au-dessus. Avec un peu de chance, elle ne voyait toutefois pas que ses fesses tremblaient légèrement. Il faisait un peu froid après tout.

Avec une assurance qu’il estimait feindre à la perfection, il pointa la baguette sur le pull et articula clairement : viridi colore. La laine rose adopta une teinte qui, dans le noir pouvait passer pour du vert, mais s’avéra plutôt un immonde kaki, de celui qu’on obtient à tous les coups quand on mélange toutes les couleurs à la fois. Il enfila néanmoins le pull. Atria avait bien jugé de la taille de Terry, il lui retombait quasiment jusqu’à mi-cuisse, encore heureux que les filles aimaient les pulls trop grands.

Il fit rouler la baguette entre ses doigts pour diriger le manche vers Atria et l’inviter à s’en saisir. « Réglons deux choses : premièrement, il n’est pas question de mariage, de fiançailles, de baiser ou de quoi que ce soit d’autres entre nous. Deuxièmement… »
Deuxièmement, devait-il la menacer de représailles si elle parlait de l’événement à quiconque? Sa sœur n’aurait pas hésité une seconde, mais peut-être n’était-ce pas là la meilleure façon de s’y prendre avec une fille comme Atria, qui croyait encore aux contes de fée moldus. « Deuxièmement, je te remercie pour ton aide, mais ce n’était pas gentil de ta part de me pourchasser comme ça. J’ai eu la peur de ma vie, tu sais. Et si les autres savaient mon secret, ils se moqueraient de moi. Alors penses-tu qu’on pourrait garder le secret, tous les deux? »

Terrence n’éprouvait absolument aucune gêne à jouer les faibles si ça pouvait lui acheter le répit nécessaire pour s’entraîner à lancer un sortilège d’oubliettes. Et peut-être même qu’il se pratiquerait sur sa sœur. Elle avait couru après. Ses lèvres s’étirèrent sur un sourire qu’il transforma à mi-chemin en sourire semi-suppliant à l’adresse d’Atria. « S’il-te-plaît? »

Tout en tirant vaguement sur le pull pour tenter de recouvrir une plus grande surface de son anatomie, Terrence gardait la tête haute et la mâchoire ferme. Il n'avait aucune intention d'aggraver la situation de faiblesse dans laquelle il se trouvait, même s'il devait temporairement jouer sur les sentiments de la fille aux cheveux roses devant lui.

Terrence suivait, avec un certain intérêt, l'évolution des expressions faciales d'Atria, qui se transformaient en moins d'une seconde. Était-ce un superpouvoir féminin? Il avait observé un phénomène similaire, quoique plus marqué par la colère, sur le visage de sa soeur tout au long de leur précédente bataille en grande salle. Atria semblait posséder un visage encore plus expressif. Juste là, son nez venait de se froncer comme si elle allait se mettre à pleurer.

Terrence faillit avaler de travers à cette seule idée. Il avait beau comment manipuler les émotions des autres, il n'avait pas encore développé son habileté à manoeuvrer les irruptions de larmes féminines. Allait-il devoir s'y mettre à cet instant? Il poussa un soupir de soulagement intériorisé quand le nez d'Atria se défripa et que la sorcière brandit sa baguette nouvellement retrouvée dans sa direction.

Ça, il savait gérer.

« Je ne suis pas moi-même quand je suis dans la peau d'un crapaud. C'est une malédiction que j'ai reçue d'une sorcière qui pensait que j'avais mangé ses précieuses carottes. Mais ce n'était pas moi, c'était ma soeur. Tu sais comment elle est... » laissa-t-il tomber dans une tentative pour amadouer la fillette. « Dès qu'elle en a l'occasion, elle cherche à m'attaquer. Elle est très forte. »

Terrence serra le poing droit derrière son dos, écoeuré par son propre mensonge. Si sa soeur avait été là pour l'entendre, elle aurait exulté. Heureusement, elle n'y était pas, alors le Serpentard se reprit et continua.

« En fait, vu comme tu as été efficace cette nuit, tu pourrais devenir mon garde du corps. Mais seulement quand ma soeur est dans les parages. »

Il ne voulait quand même pas avoir cette gamine aux cheveux roses sur les talons quand il faisait ses petites affaires et ses transactions. Et puis, quand Atria aurait mangé quelques coups de baguette sur le nez de la part d'Elizabeth, elle se calmerait sûrement et se trouverait une meilleure occupation.

( Je crois... que j'ai complètement perdu mon objectif dans ce RP. Et mon cerveau aussi. J'espère que ça te conviendra xD )

Eeeeeeeh ?

Son pauvre petit coeur se serra quand elle écouta l'histoire terriblement tragique de son nouvel ami. Elle plissa les yeux et fronça les sourcils quand il mentionna sa soeur, qui, apparemment, était une sale peste. Bah en tout cas la rumeur qu'elle entendait sur elle était assez correspondante. C'était dommage. Elle, elle l'avait jamais trouvé vraiment bizarre. Bon, il fallait être réaliste hein, c'était pas Merlin en personne. Mais bon, elle pouvait être plutôt sympathique...

— En fait, vu comme tu as été efficace cette nuit, tu pourrais devenir mon garde du corps. Mais seulement quand ma soeur est dans les parages.
— Tu me prends pour un puffskein, en fait ?

Son sourcil se haussa avec ironie. C'était pas parce qu'elle avait douze ans qu'elle était stupide. Oh. Elle était une Serpentard elle aussi, et on avait un peu tendance à l'oublier. Et c'était vraiment, vraiment dommage. Règle n°1 : toujours se méfier d'un Serpentard.

— C'est pas parce que je suis adorablement mignone avec mes cheveux roses que je suis toute stupide. Tu sais.

Elle releva le menton avec aplomb, soudainement parfaitement consciente que ses geignements à propos de princes et d'histoires moldues auraient pu la faire passer pour la plus grosse des petites gourdes, mais peu importe. Elle croisa les bras.

— Je garde ton secret, je t'ai prêté mon pull, tu m'as fait courir partout à des heures pas possibles, et en plus tu veux pas m'épouser. Je me répète mais... ma récompense, c'est de te protéger de ta méchante grande soeur ?

Autrement dit, prendre les coups à sa place ? Ben voyons. Et en plus il assumait tellement pas qu'il voulait pas qu'on les voie ensemble en dehors des moments où il y avait sa soeur ? Et il la prenait pour quoi ? Une possesseuse de retourneur de temps ? Non parce qu'elle ne prédisait pas (encore) l'avenir, alors elle était pas prête de savoir quand est-ce que sa mégère de soeur - qui, ça se trouve, était super chouette - allait se pointer. D'abord.

— Tu parles d'une récompense !

Elle se redressa et croisa les bras, mais elle garda sa main vers lui, lui rappelant au passage qu'elle avait une baguette dans les doigts. Et pas lui. Elle le regardait. Pourquoi est-ce qu'il réagissait comme ça ? En plus elle avait super froid maintenant qu'il portait son pull. Elle finit même par décroiser les bras sans le quitter de sa baguette. Bon d'accord, elle avait pas l'air particulièrement maline vu qu'elle ne connaissait probablement pas assez de sortilèges pour être vraiment menaçante, mais d'abord il était pas obligé de le savoir, et puis c'était l'intention qui comptait.

— T'es un idiot !

Et elle fit ce que toute femme baffouée devrait faire : fuir sans se retourner et aller mettre un pull dans sa chambre, chouiner sous sa couverture jusqu'à-ce qu'une de ses camarades de chambrée explose de colère et lui somme d'arrêter immédiatement ces bruits agaçants, puis bouder pendant toute la journée. Et puis elle irait voir Jenkins et ils rigoleraient ensemble. Voila. Adieu, mon beau Prince-aux-grenouilles !

(c) MEI pour APPLE SPRING

[HJ - Alors bouclons! En tout cas, merci, c'était épiquement délirant. :P ]

Voilà ce qui arrivait quand on mésestimait son vis-à-vis. Se fiant sur les vêtements d'Atria, son babillage et son allure générale, Terrence avait pensé pouvoir se jouer d'elle en faisant vibrer la corde sensible du romantisme et de la chevalerie à tout crin, mais il semblait bien que la chose rose devant lui avait un fond de Serpentard, bien caché certes, mais tout de même présent. Un fond qui venait de remonter à la surface en crevant quelques bulles au passage, dont celle d'un Terrence atrocement trop vulnérable à son goût, surtout dans un pull rose et les jambes à l'air en plein milieu de la nuit dans un couloir désert en compagnie d'une Atria rouge d'indignation.

Terrence, lui, contenait son malaise comme il le pouvait, afin de ne pas céder au hoquet de batracien qui menaçait de lui remonter à la gorge d'un instant à l'autre.

Ah, si Elizabeth n'avait pas été sa soeur, Terrence l'aurait avec grand plaisir étranglée dans son sommeil, découpée en morceaux et enterrée dans le jardin du manoir, de préférence là où les bêtes sauvages venaient parfois satisfaire leurs besoins naturels. Mais on ne touchait pas à la famille. Aussi Terrence en était-il réduit aux plans de vengeance et à la torture psychologique, même si la priorité était de trouver une manière de se sortir de cette situation embarrassante.

Et puis, il y avait cette baguette pointée dans sa direction, alors qu'il était pour ainsi dire en tenue d'Adam. Ça n'allait pas, non, ça n'allait pas du tout. Dès qu'il aurait retrouvé la sécurité de ses vêtements, et sa baguette, sans laquelle, comme bien des sorciers, il se sentait nu même habillé, Terrence mijoterait quelque chose dont sa soeur se souviendrait, et garderait la marque si possible, toute sa vie. Il allait aussi devoir apprendre, et très rapidement, le sortilège d'oubliettes, afin d'effacer jusqu'au moindre détail cette aventure gênante de la mémoire d'Atria.

Rassuré par le plan de travail qu'il venait hâtivement d'établir dans sa tête, Terrence releva le menton, en réponse à la vague colérique de la poupée rose devant lui. La baguette cessa complètement de représenter une menace lorsqu'Atria, sur une insulte qu'elle voulait sans doute blessante, tourna soudainement les talons pour s'enfuir en direction de la salle commune, abandonnant Terrence et son pull rose, et les laissant tous deux seuls dans le noir. Fantastique.

Il fallut 23 minutes au Serpentard pour retrouver le chemin de son dortoir, sans l'aide des tableaux, qui ronflaient à qui mieux mieux. Dix minutes après être entré dans les cachots, Terrence, dans son pyjama deux pièces, était allongé sous ses couvertures. Mais il ne ferma pas l'oeil du reste de la nuit, trop occupé à peaufiner sa revanche.