[1944 - Fin Janvier] Jeu de balle, jeu amical [Ruben]

C'était peut-être la première fois, depuis le début de l'année, que le ciel était vraiment dégagé. Il faisait encore froid mais Vivian avait eu hâte ressortir son balai, qu'elle n'avait pas fait voler depuis plusieurs semaines. Elle avait donné rendez-vous à Ruben dans le parc pour échanger quelques passes avec son vieux ballon de cuir.

Ruben était dans l'équipe de Serpentard, lui, et même capitaine. Vivian se dit qu'elle devrait retenter de rentrer dans l'équipe de Poufsouffle l'année suivante, un de leurs batteurs allait partir. Elle était étourdie que quand elle avait douze ans : peut-être que cette fois elle ne laisserait pas un joueur se prendre un cognard dans la tête.

La jeune fille frissonna et ramena sa cape d'hiver autour d'elle. Dessous elle n'avait qu'un pantalon en velours vert bouteille et un pull bordeaux, mais elle savait qu'elle n'aurait pas froid une fois sur le balai, lorsque l'adrénaline commencerait à faire effet.

Elle repéra enfin Ruben, qui l'attendait près de l'arbre où ils s'étaient donné rendez-vous. Elle ne put résister à l'aborder en lui lançant :

« Salut cousin ! Comment ça va depuis le match ? »

Le dernier match de Quidditch avait vu Serpentard perdre contre Poufsouffle. Vi ne se vantait pas souvent des victoires de sa maison, mais Ruben était si mauvais perdant que c'en était trop tentant. Il devait être d'autant plus frustré, elle le savait, qu'il avait été cloué au lit avec la dragoncelle au lieu d'être sur le terrain ce jour-là.

Rien n'allait dans la vie de Ruben ces temps ci.
Depuis que son frère, Roderick, avait cafté sur sa passion des baguettes magiques, il avait plus que jamais le droit à de longues lettres de sa mère lui rappelant qu'il n'en avait pas besoin pour devenir directeur de Gringotts.
S'il n'y avait que ça.
Ses affaires n'allaient pas au mieux, depuis l'affaire de la baguette de la petite Sanders, les clients se faisaient rare.. Mais c'était plus qu'injustifié ! Qu'elle idée aussi de se mettre la baguette dans l'oreille !?

Il mit son écharpe et grogna un "à plus tard" en direction de Dario son camarade de dortoir, avant de sortir, son balais en main.

Il n'allait pas s’entraîner, juste échanger quelques souaffles avec sa cousine... Et puis, les entraînements ne se passaient pas forcément bien non plus. Il remarquait bien les regards que s'échangeaient Alan et Glenn dès qu'il abordait le côté stratégie, la menace "Felix Felicis" planait au dessus d'eux. Ruben en devenait paranoïaque, à les scruter pendant les repas, ou tenter de capter des mots de leurs conversations.
Rien de probant jusqu'ici mais... Ça l'inquiétait quand même.

Il sortit du château, se promettant une énième fois de les avoir à l’œil au prochain repas.
D'un pas sûr de lui, il s'approcha du point de rendez vous qu'ils avaient fixé avec Vivian, et parut presque surprit de ne pas la voir agrippé aux branches de l'arbre devant lequel elle l'attendait.
Il sourit et accéléra le pas, avant d'entendre sa remarque.
Son air se fit plus froid et il la fusilla du regard:

"Arrête de fanfaronner ! J'aurais été présent, vous auriez perdu !"

Vivian étouffa (mal) un rire et ébouriffa les cheveux de Ruben - ou au moins tenta de le faire, puisqu'il faisait deux bonnes têtes de plus qu'elle.

« Oui, c'est vrai. » avoua-t-elle. Elle ne tenait pas à ce que Ruben lui en veuille et refuse de lui parler pendant les deux mois à venir. « Allez, j'espère que la dragoncelle ne t'a pas trop ramolli ! »

Elle planta son pied puissamment et le balai s'éleva de plusieurs mètres. Ils échangèrent quelques passes. La balle de Vi avait été un souafle mais sa couleur écarlate était passée depuis longtemps, tout comme les sortilèges permettant de l'empoigner facilement. En résultat, il n'arrêtait pas de tomber. Vi finit par se poser au sol, exaspérée.

« Tu n'aurais pas un sort pour qu'il nous colle un peu plus aux mains ? »

Elle en profita pour souffler un peu et prit une gorgée à sa gourde, dont l'eau était glaciale. Elle souffla sur ses doigts, qui commençaient à être engourdis malgré les gants en peau de dragon.

« Je ne t'ai même pas demandé... comment vont les affaires ? Et tes progrès avec Tessa ? »

Tessa était dans la maison de Vivian, qui la trouvait plutôt sympathique mais restait étonnée que Ruben s'intéresse à elle. Elle était presque aussi mauvaise élève que Ruben était brillant - mais ce n'était probablement pas important en amour.

Plus ironique : alors que Ruben devait cacher à sa famille sa passion des baguettes magiques, Tessa semblait mépriser le commerce familial des Ollivanders. Si un jour ces deux-là se mettaient ensemble, ils étaient bons pour de sacrées disputes... à moins qu'ils ne s'accordent en se plaignant de leurs familles respectives.

Ruben lui lança un regard plein de défit. Lui ? Etre ramollis par la dragoncelle ?! Elle pouvait encore rêver !
Il posa son sac à dos au niveau du tronc d'arbre et enfourcha son nouveau balais.
Il avait souvent des nouveaux balais, dès que l'usine de son père sortait un nouveau modèle ou juste quand il en avait envie, on lui en offrait un.
D'un coup de pied à terre, il se propulsa à la hauteur de sa cousine, lui faisant signe d'envoyer la balle.
Cette dernière était vieille et usée, ils jouaient avec ce même souafle depuis leur enfance, quand Vivian venait séjourner à Loutry. Il savait qu'il avait une valeur sentimentale pour elle, elle s'obstinait à jouer avec celui ci alors que son père lui en avait offert pleins d'autres.
Lissé et crevé à certains endroits par le temps et l'usage, il fendait l'air avec la lenteur d'un attrapeur Gryffondor. Il avait aussi du mal à tenir en prise.

Ruben interrompit leurs passes et prit le souafle délavé dans les mains. Il sortit sa baguette, donnant plusieurs coups et murmurant une formule.
Quand il eut finit il prit le souafle et le lança en l'air, avant de le rattraper. Ca n'avait presque rien changé.
Autant recommencer.

La fille Ollivander s'appelait donc Tessa ? C'était toujours bon à savoir, mais autant ne rien laisser paraître devant Vivian et faire comme s'il l'avait toujours su:

"Non. Bas écoute, j'ai essayé de l'aborder pour l'inviter à la fête de Slug à noël... Mais... J'ai fais demi-tours avant qu'elle me voit."

Il lança un nouvelle fois le souafle. Et le rattrapa.
Toujours pas.

"Et les affaires, disons que ça allait bien jusqu'à ce qu'une première année aussi futée qu'un elfe de maison se mette sa baguette dans l'oreille ! Ils pensent tous que c'est de ma faute si elle ressemble à un éléphant maintenant."

Troisième essai, cet fois ce fut la bonne.
Il lança la balle à Vivian:

"Ça devrait être mieux, et toi ? Tes histoires de coeur ?"

Aborder le sujet était toujours compliqué. Il savait bien qu'il était l'un des seuls à savoir pour ses préférences.

"Ma mère m'a dit que tante Mary était déjà en train de te chercher quelqu'un d'ailleurs..."

Ah, la fête de Slughorn. Vivian n'appréciait pas vraiment l'existence de ce club, ni le comportement de favoritisme du professeur, mais elle ne pouvait pas s'empêcher d'avoir un pincement de jalousie. De la curiosité, principalement.

« C'était bien le Noël du Slugclub ? »

Elle ne pouvait que compatir à la timidité de son cousin, qui avait fait demi-tour avant de parler à l'élue de son cœur. Vivian avait été la même la seule fois qu'elle avait été amoureuse.

« Si tu veux je peux t'aider à la rencontrer accidentellement... Traîner avec toi devant la salle commune de Serdaigle, quelque chose comme ça. »

Elle étouffa un rire à l'histoire de la baguette dans l'oreille, mais redevint vite sérieuse. Elle savait que son commerce de baguettes était l'une des choses les plus importantes dans la vie de Ruben.

« Dans l'oreille ? Comme... » Elle mit son auriculaire à l'intérieur de son oreiller. « Qu'est-ce qu'elle a fait exactement ? »

Vivian attrapa le souafle. Il tenait bien en main. Elle jongla avec une ou deux fois et acquiesça d'un air appréciateur. Il faudrait peut-être qu'elle le change un jour, mais c'était avec lui qu'elle avait disputé ses premières parties. Lorsqu'elle avait commencé à jouer avec ce souafle, elle croyait encore qu'elle pourrait devenir joueuse de Quidditch professionnelle... Elle remonta sur un balai et fit une passe à Ruben, mais en restant assez proche de lui pour continuer à discuter.

« Je n'ai pas vraiment d'histoire de cœur... Je ne m'occupe pas vraiment de ça en ce moment, et puis toutes les filles de Poudlard sont hétéro, non ? Enfin, si tu as quelqu'un à me présenter je dis pas non. »

La mention de sa mère lui fit rater la balle. Elle la rattrapa avant qu'elle touche le sol et soupira.

« Ouais... En plus je lui ai laissé entendre que je voulais rester à Poudlard pour les vacances parce que j'avais quelqu'un en vue... en fait je n'avais juste pas envie de voir ma grand-mère. Je sens que ça va me retomber dessus. »

Ils s'éloignèrent un peu le temps de quelques passes plus sportives. Cette fois Vivian n'en rata pas une seule, mais il faudrait surtout qu'elle s'entraîne avec une batte et un cognard. Puis Vi se rapprocha à nouveau.

« À propos de mères autoritaristes, tes parents ont toujours de grandes idées pour ton avenir ? »

Sa cousine était douée.
Ruben n'avait jamais comprit pourquoi elle n'avait pas intégré l'équipe des Poufsouffles depuis le temps.
Elle rattrapait chacune de ses passes, et pourtant, ils tentait de les rendre compliqué:

"Ouais, on a fait une démo, Slug était aux anges, il adore avoir des étudiants ambitieux."

Il préféra éviter de s'appesantir sur le sujet de ses amours à lui. C'était mal partie de toute manière.

"Hé bien, je ne sais pas trop qu'elle sort elle s'est lancé, ce que je peux te dire, c'est que son oreille touchait le sol. C'était immonde. L'infirmière n'avait jamais vu ça je pense." Il y avait une pointe d'amusement dans sa voix. C'était mal de se moquer des autres, mais là franchement, c'était bien mérité !

Puis elle parla de ses parents, et il manqua un passe. Tandis qu'il descendait chercher le souaffle, il eut un rire gêné:

"Bas... Ma mère veut que je fasse un stage à Gringotts cet été, elle en a déjà parlé à ses patrons et ils sont d'accord. Elle dit que si je fais bonne impression ils m'engageront dès ma sortie de Poudlard et que je pourrais très vite monter les échelons... "

« Une démo de tes baguettes ? »

Elle ne put retenir un rire à l'histoire de l'oreille, bien qu'elle s'en sente aussitôt coupable. Comme son cousin, elle préférait ne pas se moquer des autres. C'était probablement une raison pour laquelle elle l'appréciait - il n'était pas un Serpentard comme les autres.

Elle se rappelait avoir espéré, en première année, qu'ils soient dans la même maison ; mais les parents de Ruben auraient été horrifiés qu'il soit à Poufsouffle et Vivian n'aurait pas voulu être à Serpentard. Les gens ambitieux faisaient souvent passer leur intérêt avant ce qui était juste. Peut-être qu'ils auraient pu être ensemble à Serdaigle ?

« Je m'en veux de le dire, mais j'aurais beaucoup aimé voir ça. Je suppose que tu n'as pas pris de photo ? Non, ç'aurait été cruel... »

Son petit démon à elle n'était pas l'ambition : c'était la curiosité.

Ruben manqua une passe. Certes elle avait jeté le souaffle assez fort, mais elle soupçonnait qu'il avait été déstabilisé par sa question. Elle grimaça à sa réponse.

« Et tu leur as dit quoi ? »

Elle pensait déjà connaître la réponse à cette question. Elle n'aurait probablement pas dû la poser mais elle n'avait pas pu s'en empêcher. Elle rêvait de voir Ruben parler à ses parents de ses vraies ambitions, elle détestait le voir coincé, dans cette situation. Il y avait probablement des emplois intéressants à Gringotts mais ce n'était pas la voie de Ruben.

Mais bien sûr c'était facile à dire pour elle, qui n'aurait pas à subir la déception et la violences des parents de Ruben. Et pouvait parler, vu ce qu'elle-même cachait à ses parents.

« J'ai même pas pensé à faire un stage tiens. Je sais même pas ce que je veux faire dans la vie, de toutes façons. »

HRP:

Ruben atterrit sur la pelouse du parc, et s'avança vers le vieux souafle tombé plus loin.
En parler à ses parents ? La meilleurs blague du monde.
Autant signer son arrêt de mort, et celui de sa mère. Elle ne survivrait jamais à un tel choc:

"Non, je leur ai rien dis... Je vais le faire ce stage... Qui sait, ça me plaira peut-être ?"

Moins que les baguettes, c'était certain ! Mais... Il ne pouvait pas faire ça à sa mère, elle avait tellement eu de projets pour lui depuis le jour où il avait su dire "Gallion".
Il prit le souafle, et remonta sur son balais, décollant dans le même temps.
Il se plaça face à sa cousine et lui fit une passe, reprenant où ils en été, avant la petite interlude sur ses parents:

"Tu veux pas tenter dans une équipe de Quidditch ? Ils doivent forcément prendre des managers pendant l'été non ?"

HRP:

Comme elle aurait dû s'y attendre, Ruben n'avait pas osé s'opposer à ses parents. Elle n'était pas sure qu'il allait se plaire à Gringotts - elle ne l'avait jamais entendu exprimer d'intérêt pour ce type de travail - mais elle sentait qu'elle allait rentrer dans ses mauvaises grâces si elle insistait.

Elle attrapa la passe qu'il venait de lui faire. Un stage dans une équipe de Quidditch ? Ça pour sûr elle n'y avait pas pensé.

« Tu crois qu'ils voudraient me prendre alors que je ne suis même pas dans l'équipe de ma maison ? J'aimerais bien repasser les essais l'an prochain mais la dernière fois que j'ai essayé, quelqu'un s'est pris un Cognard en pleine tête. Et puis, une fille de seize ans pour manager une équipe d'adultes, majoritairement masculine ? Ils me riraient au nez. »

Elle aimait le Quidditch mais elle n'avait jamais pensé à travailler là-dedans. Son problème n'était pas vraiment le manque d'idées de carrière... plutôt le trop plein.

« En fait, tu te rappelles peut-être qu'avant je voulais devenir avocate. Une vraie vocation. La veuve, l'orphelin, l'élève injustement accusé, tout ça. Mais depuis que j'essaie de me soigner, je m'intéresse aussi aux potions. Du coup je ne sais plus. »

Elle se perdit un instant dans ses pensées et le souaffle passa à deux centimètres de sa tête. Elle mit un temps à réaliser qu'il était tombé et à se poser pour aller le chercher. Elle soupira.

« De toutes façons c'est pas évident de réussir dans les études quand tu es apathique la moitié du temps. »

Spoiler:

Vivian lui renvoya le souaffle qu'il attrapa et lui renvoya tout en écoutant ce qu'elle disait. Quand il vit qu'elle avait raté le souaffle à être perdu dans ses pensées, il éclata de rire. Apathique n'était pas le mot, ou du moins pas dans l'instant. Elle était plutôt rêveuse pour lui, à toujours penser à autre chose.
Il sourit en l'imaginant avocate, ça lui aurait bien été, il l'imaginait moins dans les potions mais ne devait pas assez connaître ses talents en la matière pour en juger.

-Finalement on dirait que tu as pas mal d'idées.. Puis tu n'es pas apathique puisqu'au fond, tu as tout de même des envies et des projets.

Il haussa des épaules, ce n'était pas de la grande passion comme la sienne mais, c'était déjà un début.

-Il faudrait peut-être que tu tentes vraiment les choses, ça irait mieux. Par exemple, tente vraiment les selection de Poufsouffle cette fois.