[ Mi-Décembre ] Ce dont il avait vraiment besoin. [ Sanctius & Howard ]

« Fawkes… je peux t’emprunter tes services ce soir ?»

« … je te paierais bien sûr. J’ai juste besoin…»

« De passer une soirée tranquille. Une soirée où… tu vois, personne ne viendrait m’enquiquiner avec mes problèmes actuels…»

« … tu passerais bien une soirée avec moi, non ? Après tout… le fait que je te paye ne diminue pas notre amitié, si ?»

« Et je connais un endroit… pour ce genre de choses dont on a extrêmement besoin… un endroit sympa, où on trouve tout ce qu’on veut…»

Sanctius ne pouvait pas se détendre.

Outre les bavardages incessants de ses camarades Serpentards, outre le repas du soir qui lui était resté sur l’estomac (On déconnait pas avec la Sherped’s pie à Poudlard.), outre sa note à peine plus basse qu’à l’habitude en Potions, outre le sourire indulgent et de ce fait ô combien énervant de Dumbeldore face à sa piètre tentative de métamorphoser Strychnine en théière, Sanctius n’avait plus de pastilles à la menthe. Et il avait attrapé froid. Oui, c’était terrible.

Il essayait désespérément de trouver une position confortable au fond de son fauteuil, lui-même au fond de la salle commune, bien caché dans l’ombre. Mais c’était comme si son squelette s’était rouillé tout entier et qu’importait ses contorsions, tout son être restait tendu. Il avait alors opté pour un livre, s’était roulé dans une sorte de boule peu confortable, les fesses vissées au fond de son fauteuil, exprimant son mécontentement dans un froncement de sourcil qu’il allait garder jusque dans son sommeil. Si encore il parvenait à dormir.

En même temps, qui allait chercher la détente en lisant "Aconite, Napel, Tue-Loup : Trois Noms, Une Seule Plante" ? Absorbé dans sa lecture, il ne vit pas arriver Asterion et fut surpris de se faire tirer hors de son fauteuil où sa position de boule avait fini par lui convenir. Il grogna mais n’offrit pas de résistance. Il savait qu’Asterion ne lui avait jamais voulu de mal ; même face aux humiliations subies par Sanctius, il se contentait de fermer les yeux, d’ignorer dignement ce spectacle vulgaire. Cela participait à donner à Asterion l’aspect d’un personnage rassurant. Sanctius le dépassait de quelques centimètres : tout était là pour lui donner un peu plus confiance. Il écouta sa demande sans broncher, ses yeux noirs clignant à peine. Il avait l’habitude de cette discussion confuse à voix basse où il devait comprendre que l’on sollicitait son commerce. Bizarrement, il comprenait toujours ce que l’on attendait de lui dès les trois premiers mots mais laissait toujours son interlocuteur s’expliquer jusqu’au bout, cherchant sur son visage une expression de compréhension ou d’accord alors qu’il restait parfaitement impassible. Il y prenait un malin plaisir. Et c’était pour cette raison que Sanctius resta entièrement silencieux pendant une longue minute, testant Asterion. Il aimait voir le doute s’installer chez l’autre jusqu’à ce qu’il annonce d’un ton léger « Je vais chercher ce qu’il te faut. ».

Asterion ne flancha pas, mais lui fit une proposition inattendue. Passer sa soirée avec lui au nom de l’amitié. Quelle amitié ? Ils s’asseyaient l’un à côté de l’autre aux repas en échangeant un minimum de mots, ce qui leur convenait tout à fait, et parfois, Sanctius était payé pour assouvir une envie de vengeance de son camarade sur une pauvre gamine de Poufsouffle. Alors certes, Sancty n’était pas expert en relations humaines mais se faire qualifier "d’ami " ressemblait vaguement à une combine Serpentarde et il leva un sourcil peu convaincu. Il allait refuser poliment l’invitation (Après tout, un peu d’argent lui allait très bien, il ne demandait jamais plus à qui que ce soit.) quand son interlocuteur insista : il avait repéré un endroit parfait pour s’installer à deux. A nouveau Sanctius resta silencieux. C’était curieux… Il fallait qu’Asterion soit vraiment au bout du rouleau pour vouloir sa compagnie, parce que lui-même ne voyait pas vraiment ce qu’il pouvait lui trouver. Il hocha cependant doucement la tête pour lui donner son accord et ils se mirent en route lorsque Sanctius eut récupéré le nécessaire de la soirée.

C’était étrange de suivre un garçon aussi sage dans les couloirs du château presque vides en cette vieille de week-end. En semaine, ce n’était pas si inhabituel de trouver des retardataires ou des âmes errantes comme eux ; mais les samedi soir, c’était sacré à Poudlard et les salles communes grouillaient toujours de monde. Côte à côte, ils parcouraient les couloirs et montaient les escaliers en silence. Sanctius s’appliquait à ignorer les regards curieux ou suspicieux des tableaux. Il pensait aux "problèmes personnels" de Vesago. La situation était tellement étrange ! Il avait été là le jour où Alice avait reçu la lettre annonçant le mariage à venir ; un heureux évènement forcé. Un drame à la table des Serpentards. Il devait avouer qu’il compatissait pour Asterion. La situation était d’autant plus étrange qu’il savait que son camarade était, comme lui, de sang-mêlé et donc facilement un des derniers choix en question de mariage arrangé. D’un autre côté, sa richesse excusait les blagues cruelles de ces ancêtres amoureux-de-sang-de-bourbe et rendait probablement les Vesago plus attractifs. Sanctius esquissa un sourire discret en songeant qu’une pareille mésaventure (Un mariage, Merlin !) ne risquait pas de lui arriver, à lui.

Lorsqu’ils arrivèrent au 7ème étage, Sanctius fut surpris de découvrir une porte dont il n’avait jamais constaté l’existence. D’un côté, cela pouvait s’expliquer par le fait qu’il n’avait pas prit de cours de divination et que la salle commune des Gryffondors se trouvait non loin d’ici (Territoire ennemi, donc.). Asterion le fit entrer dans une salle gigantesque… agencée comme un salon. Plusieurs grands canapés formaient un large carré autour d’une table basse. Sanctius se tourna lentement vers son compagnon, le considérant avec surprise.

« Mais comment t’as trouvé ça ?.. Je ne connaissais même pas cet endroit. »

Le garçon regardait curieusement autour de lui, ses grands yeux cherchant à enregistrer tout ce qui faisait la salle. Lui qui passait tant de temps à fouiner dans le château n’avait pourtant jamais vu pareil lieu. Il fit quelques pas pour s’avancer plus profondément dans la salle, la scrutant de haut en bas, puis finit par s’étaler nonchalamment sur un canapé, s’étendant de tout son long comme un chat paresseux. Enfin, ses yeux noirs retombèrent sur Asterion et il esquissa un sourire satisfait.

« Sympathique, comme tu dis. »

Il fourra alors la main dans un pli de sa cape pour tirer quelques bouteilles de la poche (Approfondie par un sortilège d’extension indétectable.) et les posa sur la table, avant de croiser ses bras derrière la tête pour s'en servir comme oreiller.

« Hmm… Rien de bien original ce soir. J’ai du whisky pur feu, mais tout te va pour ce que tu veux en faire, non ? »

Peut être allait-il enfin pouvoir se détendre après tout...