[4 Décembre 1943] Leurs voler dans les plumes (Lilith)

C’est quand même beau la neige, même si c’est tout blanc.
Du moins c’est la réflexion que se faisait Lilith en observant rêveusement la couche blanche nacrée qui recouvrait le parc et les alentours du château comme un épais sucre glace. La tête appuyée sur ses bras croisées sur le rebord d’une fenêtre, hissée sur la pointe des pieds, elle parcourait l’extérieur enneigé de ses yeux d’argent. Évidement, elle avait déjà vu de la neige, elle tombait aussi à Manchester. Mais elle n’avait encore jamais vu un décor aussi vaste et beau que l’extérieur de Poudlard sous la poudreuse.
Un petit sourire étira le coin de ses lèvres, puis elle se décida enfin à détacher les yeux de l’environnement hypnotisant et tourna les talons. Tranquillement, elle se rassit sur le banc posé à coté d’elle contre le mur et reprit le livre qu’elle y avait laissé pour se replonger dedans, plus songeuse que jamais.

Cela faisait déjà une bonne heure qu’elle se trouvait dans le couloir qui reliait le hall à la sortie du château.
Le matin même, elle s’était réveillée de bonne heure. Non pas qu’elle veuille particulièrement profiter d’une matinée en fin de semaine, mais elle avait été réveillée en sursaut à la sortie du tourbillon de cauchemars dans lequel elle était plongée. Toute en sueur et le coeur battant, elle avait décidée de se lever pour chasser de sa tête les images sombres de sa mère hurlant dans les flammes qui la consumaient. Ce genre de cauchemars étaient très récurrents. Un soir sur trois ils revenaient la harceler à vrai dire.
Bien décidée à se changer les idées, elle s’était habillée rapidement, n’oubliant pas de prendre une cape et un manteau au vu de la température extérieure de ces derniers jour, puis s’était emparé de sa sacoche dans laquelle elle avait fourré son livre sur les créatures magiques emprunté à la bibliothèque et s’était dirigé vers la Grande Salle sans réveiller ses camarades de chambre.
A sa grande satisfaction, l’endroit était presque vide à cette heure et la petite albinos avait prit tout son temps pour manger son petite déjeuner. Puis, elle avait posé son livre devant elle et s’était plongé dedans, fascinée par un passage qui parlait des gryffons.
Malheureusement, cet instant de paix avait été de courte durée et bientôt les élèves fraîchement réveillés avaient envahi la Grande Salle. Si le brouhaha qui s’était formé avait d’abord gêné la fillette, la poussant à plaquer ses mains sur ses oreilles, ce ne fut rien comparé à l’arrivée d’un groupe de filles de Serpentard qui, s’asseyant à leur table non loin d’elle avait commencé à pouffer de rire en plaisantant sur ses cheveux dépeignés et sa petite taille. Les sourcils froncés, Lilith avait tenu pendant plusieurs minutes avec obstination avant de craquer et de refermer son livre pour partir de la salle avant que d’autres ne se joignent aux brimades.
Elle avait d’abord pensé à aller de nouveau se cacher à la bibliothèque mais son regard avait soudain été attiré par un éclair blanc à l’une des fenêtres du Hall. Intriguée, elle s’était rapprochée pour entr'apercevoir le décor brillant du parc. Fascinée, elle avait rapidement emprunté le couloir du patio pour admirer la couche de diamant sur la pelouse. Et depuis plus de soixante minutes à présent elle jonglait entre la lecture de son livre, confortablement installée sur un banc et la contemplation du parc derrière la fenêtre.
Quelques élèves étaient bien passés par là pour sortir dehors, mais aucun n’avait prêté réellement attention à la petite Poufsouffle. Celle ci ne s’en plaignait pas. Mis à part quelques exceptions, peu d’élèves s’adressaient à elle, si ce n’est pour se moquer ou la rabaisser. Alors elle préférait qu’ils l’ignorent.

Lilith était de nouveau repartie dans l’admiration de l’extérieur nacré lorsqu’un coup d’oeil distrait vers le Hall lui offrit soudain la vision d’un jeune homme qu’elle connaissait s’approchant de sa position. Reconnaissant le visage joyeux d’ Ethan, elle se décrocha de la fenêtre et se tourna vers le garçon qui se rapprochait de sa position.
Ethan était un Poufsouffle de sixième année et son aîné de cinq ans. Gentil et toujours joyeux il s’était toujours montré amical et prévenant avec la petite albinos qu’elle était. A vrai dire, il était l’une des rares personnes à qui elle acceptait de parler. Aussi, lorsqu’il la remarqua et lui adressa un sourire et un signe de la main, elle y répondit avec joie, éclairant un instant son visage marqué de cernes.

“ Bonjour Lilith ! Tu es toute seule ? ” lui lança le jeune homme de son habituelle voix pleine d’entrain en s’approchant.

La fillette lui répondit par un nouveau petit sourire et un hochement de tête approbateur, ne semblant pas du tout marquée ou attristée par ce que pouvait sous-entendre sa réponse. Elle ne fut pas sûre néanmoins que le Poufsouffle la perçu car il tourna la tête à droite et gauche, comme s’il s’attendait à ce que des personnes soient cachées derrières les statues et piliers du Hall. Lorsqu’il revint à elle, toujours souriant, il lui tendit soudain le toast tartiné qu’il tenait dans la main.

“ T’en veux un peu ? ” proposa t’il avant de se lancer dans un impressionnant enchaînement de paroles rapides, débattant seul sur les différentes garnitures possible à mettre sur un toast.

Si elle ne le connaissait pas, Lilith serait sans doute restée bouche bée devant un tel flot de mots ininterrompu. A vrai dire c’est même la réaction qu’elle avait eu la première fois. Mais elle connaissait Ethan depuis plus d’un mois maintenant et elle connaissait son entrain à parler autant. Elle se contenta donc de lui sourire avec amusement.
Se rendant sans doute compte qu’il avait beaucoup parlé, le jeune homme conclu :

“ Enfin… Heu… T’en veux du coup alors ? ”

La petite albinos hésita, puis s’empara doucement du toast, prononçant un petit “merci” reconnaissant. Elle n’avait pas vraiment faim puisqu’elle avait mangé un peu plus d’une heure plus tôt. Mais elle n’avait pas envie de vexer l’une des seules personnes qui s’adressait à elle sans dédain ou moquerie. Aussi elle mordit timidement dans le pain sucré. Sa bouchée avalée, elle pencha légèrement la tête sur le coté en regardant les cheveux de son camarade de Poufsouffle. Elle avait remarqué que depuis quelques temps, ces derniers avaient perdu leur tête bleue habituelle pour arborer une couleur grisâtre. La fillette s’était souvent demandé pourquoi il s’était coloré les cheveux en gris ? Elle préférait le bleu c’était plus jolie.
Mais elle n’avait malgré tout pas osé lui poser la question.
En revanche, sa curiosité était éveillée à présent.

“ Tu fais quoi dis Ethan ? Tu es pas avec tes amis aujourd’hui ? “

Histoire de la finir, elle mordit de nouveau dans le toast et l’englouttit en quelques bouchée supplémentaires. La bouche à moitié pleine elle se reprit :

“ Merchi pour le toacht. Tu va faire quoi auchourd’hui dis Ethan ? ”

Elle posait les questions sans retenue, sachant bien que d’ordinaire sa curiosité avait toujours été bien reçu par le jeune homme.

“ Hum.. non. Ils sont en train de faire leurs devoir de Métamorphose et de Sortilège.. mais moi.. Enfin moi j'ai plus ces matières là... Puis je me suis un peu disputer avec Stephan.. mais bon enfin.. Du coup je suis tout seul pour pas les déranger comme ça c'est mieux pour tout le monde. “

Lilith pencha la tête sur le coté à ces mots sans cesser d’observer son interlocuteur.
Oui, juste à l’instant, c’était bien de la tristesse qu’elle avait vu dans son regard. Elle en était presque sûre et elle en fut d’autant plus marquée que, de souvenir, elle n’avait encore jamais vu le joyeux Ethan triste.
Il s’était efforcé de minimiser ce qu’il avait désigné comme une dispute entre lui et un certain Stephan, mais Lilith avait l’impression que c’était plus grave que ça. Et puis, qu’elle même soit seule ne lui paraissait pas vraiment étrange, elle en avait prit l’habitude. Mais que son camarade de Poufsouffle se retrouve sans ses amis… C’était plus inattendu et presque inquiétant…
Mais le jeune homme retrouva vite son entrain habituel et, tout sourire, désigna l'horizon derrière la fenêtre. Suivant son doigt, Lilith jeta un oeil aux filets de fumée qui striaient le ciel au loin. D’après ce qu’elle avait entendu chez ses camarades enthousiastes, ces fumées appartenaient au village de “Pré-au-Lard”, apparemment l’un des seul villages de sorciers de Grande Bretagne.
Ethan annonça alors qu’il comptait s’y rendre et commença à détailler certaines merveilles qu’on pouvait y trouver, lui posant comme d’ordinaire des questions à laquelle elle avait à peine le temps de répondre par un hochement de tête. Mais sa conclusion résonna un moment dans l’esprit de la petite albinos.
“Si tu veux on y va ensemble si tu fais rien.”
La phrase tourna un certain temps dans l’esprit de la fillette qui resta immobile, les yeux devenant de plus en plus ronds de surprise alors qu’elle commençait à réaliser que son aîné de Poufsouffle lui proposait de l’accompagner.
Totalement prise au dépourvu, elle ne su pas du tout quoi répondre et regarda Ethan avec un air un peu bête. Personne ne lui avait jamais proposé une activité commune. Bon il faut dire que sa timidité ne faisait rien pour arranger les choses. Pourtant est ce qu’elle préférait la solitude ? Elle ne savait pas vraiment. On va dire qu’elle s’y était faite.
Mais la proposition soudaine d’Ethan la faisait hésiter. Par gène ? Par crainte ? Impossible de le savoir…
Comme s’il avait perçu son doute, le jeune homme renforça son propos en concluant :

“ Puis comme ça on est plus seul. Ni toi ni moi. Et faut bien que tu goûte les nuages de barbe à papa ! Ou ce que tu voudras d'autre en faite, c'est moi qui t'invite ! ”

Les joues de Lilith s’empourprèrent. Déjà qu’Ethan l’invitait sans raison à l’accompagner, voilà qu’il lui proposait en plus de lui payer quelque chose. Si elle n’avait pas eu en lui cette confiance naturelle, elle aurait sans doute trouvé cela suspect. Mais dans l’instant présent, elle se sentait juste embarrassée, trouvant difficilement de quoi répondre.
Il lui fallut plusieurs minutes à triturer nerveusement la manche droite de sa robe de sorcier, les joues rouges, avant de consentir à répondre.

“ Je… Je... “

Bon… Second essai.
Et puis après tout… Pourquoi pas ? Elle avait confiance en son camarade et elle était assez curieuse vis à vis de Pré-au-Lard pour se laisser tenter.
Un sourire timide mais sincère naquit sur son visage enfantin. Elle hocha alors positivement la tête pour s’encourager à parler.

“ D’a.. D’accord ! Je veux bien ! Merci beaucoup ! ”

Un peu moins troublée après avoir réussi à parler, elle sourit avec joie au jeune homme. Puis, réfléchissant soudain à quelque chose, elle s’empressa d’ajouter.

“ Heu… Attends moi, je reviens ! ”

Elle fit demi-tour et fila en courant vers la porte des cachots, espérant de tout coeur qu’Ethan allait patienter le temps qu’elle revienne. A toute allure, elle fila jusqu’à l’entrée de leur salle commune, toqua rapidement le bon rythme sur les tonneaux de l’entrée et pénétra dans la salle. Sans attendre, elle emprunta l’un des tunnels qui menait aux chambres et entra vivement dans la sienne. Quelques secondes plus tard, elle ressorti de la pièce et traversa en trombe la salle commune dans l’autre sens, rangeant dans sa sacoche son violon et son archet qu’elle avait décidé d’emmener.
C’était sa première sortie aussi loin du château depuis la rentrée et elle se demandait si le village de Pré-au-Lard allait lui inspirer des mélodies.
Sans cesser de courir, elle rebroussa chemin et revint dans le hall, ne s’arrêtant que lorsqu’elle fut de retour devant Ethan qui, à son grand soulagement, l’avait attendu. Hors d’haleine, elle prit quelques instants pour retrouver son souffle, les mains sur les genoux. Puis elle releva un visage ravi et souriant vers son compagnon.

“ Ca… Ca y est ! Je suis… prête ! ”

Son souffle retrouvé, elle se redressa vivement. Pour une fois, elle se tenait la tête haute. Maintenant qu’elle avait accepté la proposition, elle se sentait impatiente de prendre la direction du fameux village de sorcier.

Souriant devant son essoufflement, ou son air enjoué, Ethan lui précisa qu’il l’aurait attendue de toute façon et la compara à un vif d’or, cette petite boule volante et rapide que poursuivaient les joueurs sur balais.
Cette fois, pas de rougissement, Lilith se contenta de lui rendre un sourire radieux, contente tout de même qu’il soit bel et bien resté.
Puis le jeune homme l’invita gentiment à la suivre et tout deux se dirigèrent vers la sortie du château, Ethan marchant tranquillement et Lilith trottinait  joyeusement à coté de lui. Son sourire ne se décrochait pas. Et même lorsqu’ils durent se frayer un chemin dans la neige assez épaisse, il était toujours là. Elle se sentait vraiment joyeuse, sans doute pour la première fois depuis des mois.
Il progressèrent tranquillement, la fillette s’efforçant de ne pas trop enfoncer ses bottes dans la poudreuse avec sa petite taille et Ethan commentant joyeusement la beauté de la neige et celle du village de Pré-au-Lard. Puis ils atteignirent la forêt et un chemin plus nettement tracé leur permit de marcher avec plus d’aisance. Il ne faisait pas très froid dehors et la cape et l’écharpe de Lilith suffisaient à lui tenir chaud. Néanmoins, du fait de sa maladie pigmentaire, ses joues, son nez et ses oreilles se colorèrent immédiatement d’un rouge clair.
Laissant ses pensées vagabonder, essayant d’imaginer le village que lui avait décrit Ethan, la petite albinos jeta des regards brillants au paysage de nacre. D’ordinaire elle n’aimait pas le blanc, mais là, elle devait reconnaître que c’était vraiment beau. Elle sourit de plus belle.

“ Dommage que mes cheveux soient pas un peu plus blancs sinon on serait tout les deux assortis au reste du monde ! “

La petite Poufsouffle releva des yeux surpris vers son compagnon qui venait de parler. Elle l’observa quelques secondes, puis regarda ses pieds, son sourire s’effaçant doucement.
Des cheveux blancs... Elle observa l’une de ses mèches qui lui pendait devant les yeux, puis se passa une mains dans les cheveux. Elle, elle n’aimait pas ce manque de couleur qu’avait sa chevelure. Elle avait du mal à imaginer qu’on puisse désirer avoir la même décoloration. Elle aurait donné beaucoup de son coté pour que les siens soit différents. Comment en aurait il pu être autrement ? Ils lui avaient apporté tant de mal…
Légèrement assombrie, la fillette releva un regard dont elle s’efforça de cacher l’amertume vers Ethan. Ses yeux s’écarquillèrent alors lorsqu’elle vit la chevelure du jeune homme passer presque instantanément du gris au blanc sous son air concentré. La fillette en resta bouche bée et seul le mouvement qu’elle avait imprimé à ses pieds la firent continuer d’avancer.
Comment son compagnon avait il fait ça ? Quel était ce sort ?
Elle avait toujours cru que le bleu était la couleur naturelle du jeune homme et qu’il se teignait les cheveux.
Surprise et fascinée, elle regarda Ethan avec des yeux ronds comme des billes. Celui ci lui rendit son regard, toujours aussi joyeux et lança avec entrain :

“ Voila ! Ils sont comme toi.. J'ai toujours trouvé ça jolie tes cheveux, c'est fait exprès qu'ils soient blancs comme ça ? Une fois j'ai vu quelqu'un qu'en avait des rouges, c'est jolie aussi mais c'est un peu voyant. Blanc c'est comme... la neige, ou des nuages ! Ça fait serin et calme.. un peu mystérieux. Enfin ça te vas bien quoi ! ”

Rougissant sous les compliments, Lilith tira avec embarras sur une mèche de ses cheveux à la coiffure totalement délaissée. Elle soutint néanmoins le regard d’Ethan et retrouva même son sourire.
Une lueur un peu étrange dans le regard, elle perdit alors ce dernier dans le vague avant de répondre.

“ C’est… à cause de ma maladie. Ma maman m’a dit quand j’étais petite que je suis albinos. C’est pour ça que mes cheveux sont tout blancs et mes yeux tout gris... ”

La lueur dans son regard devint un peu plus sombre et son sourire plus triste. Puis elle ajouta dans un souffle presque inaudible :

“ Et c’est pour ça qu’on me déteste. “

Ignorant la dernière phrase qui lui avait presque échappé, elle releva les yeux vers la chevelure désormais blanche d’Ethan. Et soudain, son sourire s’étira et son visage s’éclaira d’une reconnaissance sans nom.

“ Merci Ethan. Merci beaucoup. “

Elle avait parlé d’une voix sincère et aussi reconnaissante que son expression. Elle venait de s’en rendre compte, à ses yeux le jeune homme venait de lui faire un cadeau inestimable. Une douce chaleur était venue lui réchauffer le coeur et ses mauvaises pensées s’envolèrent alors presque aussitôt.
Sa bonne humeur retrouvée, Lilith reprit une marche plus joyeuse à coté de son compagnon, sourire aux lèvres. Sur le chemin, ils bavardèrent de tout et de rien, la petite albinos se prenant finalement au jeu et retrouvant la parole. L’ambiance était enjouée et lorsqu’ils arrivèrent devant les premières maisons de Pré-au-Lard, la petite Poufsouffle se sentait vraiment légère, la solitude de ces dernières semaines presque oubliée. Mais sa joie ne fut rien comparée au spectacle qui l’attendait. Ses yeux s'agrandirent de nouveau et son regard s’illumina. Devant eux s’étendait le village de Pré-au-Lard. Et quel village !
Le long de chemins sinueux en terre couverts de neige, des maisons de style ancien faites de bois et de pierre s’alignaient comme une longue file d’attente. Des chaumières plus rudimentaire jaillissaient ça et là plus loin dans le paysage nacré, tous couvertes d’une couche de poudreuse qui leur donnait des allures de gros pains d’épices couverts de sucre-glace. Des sorciers habillés de manière plus ou moins extravagante vagabondaient entre les différentes boutiques présentes pendant que des hiboux et chouettes en tout genre parcouraient le ciel au dessus de leurs têtes. Enfin, un peu plus loin, une fête semblait battre son plein au pied d’un gigantesque sapin de noël.
Lilith avait du mal à en croire ses yeux. Elle avait plusieurs fois tenté d’imaginer le village de Pré-au-Lard. Mais aucune de ses versions chimériques ne ressemblait à la réalité ! Alors qu’ils avançaient le long du chemin, elle jeta des regards dans tous les sens, essayant de tout voir, de tout entendre. Partout autour d’eux, des élèves passaient d’une boutique fantastique à l’autre, riant, bavardant et courant joyeusement. Et pour une fois, elle se fichait complètement qu’il y ait du monde autour d’elle tant la bouffée de joie qu’elle ressentait était forte.
Sans qu’elle s’en rende compte, son sourire s’étira davantage, illuminant son visage enfantin et une petite exclamation rieuse monta même de sa gorge.
Les joues rouge, de bonheur cette fois, elle releva vers Ethan des yeux grands ouverts éclairés d’un ravissement qui faisait briller ses iris d’argent.

“ C’est magnifique ! “ s’exclama t-elle.

Contenant difficilement son enthousiasme, elle trottina de plus belle aux cotés de son compagnons et ferma les yeux quelques secondes, respirant à grandes bouffées l’odeur de chaume, de sucre et d’épices qui se dégageait dans l’air. Elle résista à la tentation de sortir son violon pour exprimer son allégresse par une mélodie et se contenta de serrer sa sacoche dans laquelle il se trouvait contre elle.
En cet instant, elle était persuadée que rien ne pourrait faire diminuer sa joie.

Souriant devant l’enthousiasme de sa camarade, Ethan prit alors la main de Lilith dans la sienne. Ce geste sécurisant rassura la fillette plus qu’il ne la gêna tant elle se sentait taraudée entre son impatience de tout visiter et son angoisse vis à vis du monde qu’il y avait dans chaque boutique. Serrant sa petite main dans celle de son aînée, elle ne cessa de regarder de tout coté, se demandant par quelle échoppe ils allaient bien pouvoir commencer. Comme s’il avait lu dans ses pensées, Ethan dit joyeusement :

“ Tu veux .. commencer par quoi ? Je propose Honeydukes, c'est plein de bonbons et de confiseries. Comme ça après on pourra ce balader autant qu'on veux ! Viens c'est par la. “

L’attirant avec elle, ils se dirigèrent vers une boutique d’où émanaient de délicieuses odeurs sucrées. Le bâtiment arborait des couleurs chatoyantes et deux grandes vitrines où s’étalait les confiseries les plus incroyables que Lilith eut jamais vu. Et ce n’était rien comparé à ce qu’elle découvrit à l’intérieur.
Une fois encore elle en resta bouche bée. Il lui semblait être entrée dans un autre monde. Autour d’elle d’immenses étagères montaient presque jusqu’au plafond, exposant des confiseries plus surprenantes les unes que les autres. Au milieu de la pièce, de grandes tables présentaient encore plus de sucreries. Lilith se retrouva si impressionnée et fascinée qu’elle en oublia presque son compagnon, sa main laissée seulement en réflexe dans la sienne.
Ethan la lui lâcha alors doucement avec un sourire et l’invita à s’avancer, lui indiquant qu’elle pouvait prendre ce qu’elle voulait. Le rouge monta aux joues de la petite albinos qui bafouilla qu’il n’était pas obligé. Mais le jeune homme ne l’écouta pas ou ne l’entendit pas, se dirigeant déjà vers un endroit du magasin où des baguettes de bois fabriquaient toutes seuls différentes sortes de barbe-à-papa.
Restée seule, Lilith s’efforça de progresser dans la boutique. Il y avait pas mal d’élèves mais beaucoup moins que dehors et pas assez pour que la fillette se sente vraiment gènée. Sa curiosité primant sur tout le reste, elle commença à passer d’une étagère à l’autre, lisant chaque nom et chaque description. Il y avait tellement de choses nouvelles qu’elle ne savait plus où donner de la tête. Des chocolats aux formes dingues, des bonbons aux effets magiques incroyables, toutes sortes de sucreries ensorcellées…
Lilith observa un moment avec fascination un groupe d’élèves qui mangeaient de grosses boules de sorbet qui les faisaient s’élever légèrement au dessus du sol. Puis elle refusa énergiquement de la tête la proposition d’un autre élève de Serpentard, qui l’invita à tester les “Suçacide” avec un sourire malicieux, et s’éloigna rapidement.
Finalement son attention se trouva attirée par une séries de boîtes qui présentaient plusieurs parfums d’un bonbon en forme de papillons. Curieuse, elle lu l’étiquette : “ Papillons-arlequin : soufflez dessus et ouvrez la bouche, ils y voletteront tout seuls ! ”. Ses yeux s’illuminèrent.
Quelques secondes plus tard, elle se rapprocha en trottinant de Ethan, les pupilles brillantes. Lorsque ce dernier se tourna vers elle, lui demandant, toujours souriant, ce qu’elle avait choisi, la petite Poufsouffle lui présenta fièrement sa trouvaille : une petite boîte de papillons-arlequins à la pomme. Pendant un court instant elle retrouva un visage enfantin qui traduisit ce qu’elle était encore vraiment. Son humeur étant montée au beau fixe, elle aida ensuite avec une joie non dissimulée son aîné à trouver des confiseries pour ses amis. Se prenant au jeu, elle examina toutes les sucreries, proposant au garçon les plus saugrenues ou les plus amusantes. Et quelques instants après, ils se retrouvèrent devant le comptoir du vendeur, leurs articles dans les bras.
Ethan sortit alors son argent pour régler et Lilith se mit à rougir encore une fois.

“ Tu… Tu n’es pas obligé… J’ai un peu d’argent aussi… “ bredouilla t-elle en tapotant timidement sa sacoche.

H.S:

À son instant de doute, Ethan répondit du tac au tac, mettant court à toute réplique :

“ Je t'ai dis que je t'offrirais quelque chose non ? C'est comme un cadeau ! Ça me fait plaisir, surtout si toi ça te fais plaisir ! “

Lilith rougit de plus belle mais parvint à lui retourner un petit sourire timide. Sourire qui se transforma en léger rire amusé et étouffé lorsque le jeune homme lui tira espièglement la langue. Celui ci paya donc l’ensemble des produits choisies et Lilith l’aida ensuite à remplir son sac avec toutes les confiseries acquises. Sa boîte de papillons-arlequins en mains, les yeux brillants de joie, la fillette suivit en trottinant son ami hors de la boutique, presque déçue de quitter l’endroit mais impatiente de découvrir d’autres boutiques aussi incroyables.
Lorsqu’ils furent de retour dehors, le froid se remit à mordre avec acharnement la peau fragile de la petite albinos, lui rossissant les joues, le nez et les oreilles. Mais celle ci n’y fit pas attention, trop heureuse en regardant sa première boîte de confiseries magiques. Son sourire ne décrochait pas de son visage lorsqu’elle adressa un regard brillant de reconnaissance à son aîné.
Ethan leva joyeusement sa barbe à papa et lança à la cantonade malgré la température qui semblait faire hésiter sa voix :

“ Bon.. voilà.. Maintenant ou tu... hé ! ”

Sous les yeux ébahis de la petite albinos, un morceau de la barbe à papa s’envola soudain dans les airs sous l’effet d’un vent inexistant. Fascinée, elle regarda le nuage sucré prendre de la hauteur. Son compagnon sortit alors sa baguette, la pointant sur le fragment de barbe à papa puis il prit une inspiration, comme s’il s’apprêtait à lancer une formule. Captivée, Lilith observa avec grande attention les faits et gestes de son aîné. Elle était toujours curieuse de voir le moindre sortilège.
Tout se passa alors en un éclair. Il y eut un bruissement d’ailes et la petite albinos sentit un léger courant d’air au dessus de sa tête alors qu’une plume grise lui tombait devant le nez. Puis la baguette d’Ethan disparu d’un seul coup de sa main.
La fillette tourna vivement les yeux juste à temps pour voir un hibou massif filer dans la rue en braillant avec mauvais humeur sur les passants. Dans ses serres, Lilith aperçu un long morceau de bois clair : la baguette !
Les yeux de la petite albinos s’écarquillèrent et sa bouche resta bêtement ouverte, ayant du mal à connecté son esprit à l’irréalité de la situation. Elle tourna son regard vers Ethan qui en fit de même, apparemment aussi éberlué qu’elle.

“ ... Il a volé ma baguette... ”

Énumérée par le garçon, cette vérité prit enfin tout son sens dans la tête de la fillette et elle se sentit pâlir. Elle était encore nouvelle dans ce monde de sorcellerie, mais si elle avait bien comprit une chose, c’était à quel point la baguette magique d’un sorcier était quelque chose de personnel et d'excrément important, au même titre que son violon. Ethan semblait au bord de la panique malgré le visage contrôlé qu’il affichait. Ses cheveux étaient soudain devenus… Encore plus blancs que ceux de la petite albinos !
Celle ci sentie l’angoisse monter en elle. Il fallait absolument récupérer la baguette de son compagnon ! Ethan la devança :

“ Faut que... faut que je le rattrape ! ”

Il lui adressa un sourire qui se voulut rassurant mais qui fut si tendu d’inquiétude que Lilith se réveilla soudain. Elle hocha vivement la tête de façon déterminée et serra la sangle de sa sacoche, prête à poursuivre le volatile voleur aux cotés de son compagnon de Poufsouffle. Ethan lui tendit alors la main et, fébrile, demanda :

“ J'espère que .. tu cours vite... ”

Lilith hocha de nouveau la tête. Il n’y avait pas de temps à perdre ! Elle savait très bien à quel point une baguette était importante ! Elle attrapa alors la main du jeune homme et fut la première à s’élancer, lançant d’une voix déterminée :

“ Vite ! Il faut le poursuivre ! ”

Les Poufsouffle bondirent en avant, se lançant dans une course effrénée à travers les rues de Pré-au-lard aux trousses du hibou grognon. Lilith courrait aussi vite qu’elle le pouvait, s’efforçant de respirer par grandes bouffées malgré l’air froid pour éviter les points de coté. Heureusement si elle était d’une faible carrure et d’une taille ridicule, elle possédait au moins une certaine célérité lorsqu’il s'agissait de courir. Célérité dont elle se servait souvent pour fuir…
Néanmoins, après plusieurs minutes de courses, elle sentit que son souffle commença à lui faire défaut. L’air glacial lui brûlait l’intérieur de la gorge et ses jambes commençaient à se plaindre. Elle s’obligea pourtant à continuer de poursuivre le volatile qui filait toujours entre les maisons, comme s’il se savait poursuivi, tâchant de rester au même niveau qu’ Ethan. Mais soudain, concentrée sur sa perte d’endurance et moins sur sa route, elle buta sur un petit rocher couvert de neige et s’étala de tout son long dans la poudreuse.
La fillette se releva sur ses genoux en crachant de la neige et s’essuyant le visage. Le souffle court, elle lança un regard piteux et désolé à Ethan. A cause d’elle ils allaient perdre leur poursuiv… Non ! Il était là !
Maladroitement, Lilith se redressa et pointa énergiquement du doigt une maison à quelques mètres de là.

“ L… Là !... hhh… hhh… Le… Le hibou ! Il… hhh… Il est entré par la… fff...fenêtre… du haut ! “ bafouilla t’elle, essoufflée.

Elle prit quelques secondes pour retrouver une respiration normale, les jambes flageolantes, et observa la bâtisse que le volatile avait choisi comme cachette. Ce n’était pas vraiment sur celle ci que son choix à elle se serait porté… L’endroit était vieux et délabré, construit sur une petite colline un peu à l’écart des autres maisons. Si on mettait à part ses fenêtres presque toutes condamnées, sa toiture qui partait en morceaux et sa structure bringueballante, l’endroit dégageait quelque chose de lugubre qui fit frissonner la petite albinos. Un peu plus angoissée tout à coup, elle se rapprocha en réflexe de son aîné de Poufsouffle et lui lança un regard inquiet.

“ Il… Il faut qu’on aille la chercher… Il faut… pas que tu perdes ta baguette... “ souffla t-elle doucement, comme si elle essayait elle même de se donner du courage.

Sa petite main attrapa un bout du vêtement du garçon et le serra alors que son regard d’argent contemplait avec inquiétude la maison devant eux. Elle avait presque l’impression que celle ci les regardait...

H.S:

Si Ethan paru un instant aussi angoissé qu’elle, il ne le montra pas longtemps et retrouva son sourire rassurant.
D’une main, il épousseta consciencieusement les cheveux et la robe de sa cadette de Poufsouffle. Puis il lui assura d’une voix qui avait presque retrouvé sa joie qu’ils allaient vite retrouver sa baguette. Lilith s’efforça de lui sourire à son tour, même si le sien paru peut être un peu plus hésitant. Malgré la boule d’angoisse qui s’était formée dans son ventre, elle se sentait un peu rassurée par la présence du garçon aux cheveux ble… ah bah non blanc c’est vrai. Alors, lorsqu’il lui reprit la main et se lança dans un nouveau débit de paroles joyeuses, elle sentit son inquiétude se calmer doucement et écouta avec attention son compagnon, hochant juste négativement la tête lorsqu’il lui demanda si le contact de sa main la gênait.
Après tout, cette maison n’avait peut être juste qu’une apparence effrayante, elle même savait très bien qu’il ne fallait pas se fier aux apparences. Et puis elle connaissait des endroits bien plus effrayants dans sa mémoire… Oui, Ethan avait raison, ça pouvait être une aventure amusante après tout.
Un peu ragaillardie par cette idée, elle sourit davantage et suivit le jeune homme jusqu’au perron de la bâtisse délabrée. Le grincement de la maison fit frissoner la fillette mais elle resta courageusement immobile et droite sur le palier, serrant juste un peu plus la main d’Ethan qui d’ailleurs en fit autant.

“ Bon... Peut être que celle ci fait un tout petit peu plus peur.. Mais on va pas se laisser dégonfler hein ! ”

Le jeune homme avait lancé ça d’une voix déterminée qui se voulait entraînante et brandit même le poing en signe de défi. Ce geste eut l’effet escompté et Lilith pouffa de nouveau de rire, imitant alors son camarade de maison et levant le bras en l’air, poing fermé.

“ On… On a pas peur de toi la vieille maison qui grince ! Tu vas nous rendre la baguette d’Ethan ! “ se permit elle même de lancer, atteinte par la détermination et la joie de son compagnon.

Le jeune homme aux cheveux changeants avança alors sa main et poussa la porte de la maison. Comme en réponse à leurs provocations insolentes, celle ci grinça de manière appuyée et presque morbide. Le son produit ressembla presque au gargouillement d’un ventre monstrueux, comme si la maison était sur le point de les dévorer… Lilith sentit tout les poils de son épiderme se dresser d’un seul coup et, malgré sa semi-assurance précédente, elle déglutit et se fit un peu plus petite.
Mais il était hors de question de reculer ! Ethan avait été gentil avec elle et lui avait offert la première journée vraiment joyeuse qu’elle avait eu depuis des mois. Alors il était impensable de l’abandonner alors que sa baguette venait de lui être dérobée.
A l’intérieur, l’endroit était sombre, mais les yeux décolorés de la petite albinos s’habituèrent vite. Le vestibule dans lequel ils étaient entrés semblait aussi vieux et lugubre que l’extérieur. Le bois pourri qui formait le plancher grinçait au moindre de leurs pas comme une mélodie macabre et le vent, faible pourtant, faisait claquer les volets de l’étage, faisant sursauter Lilith à chaque fois. Le mobilier était poussiéreux et tombait à moitié en ruine. Quand au lustre accroché au plafond, il semblait pouvoir se décrocher à tout moment malgré les centaines de toiles d'araignées qui le reliaient aux poutres.
Dans tout ce décor effrayant, la voix d’Ethan paru presque irréelle à la petite Poufsouffle.

“ Donc.. Hum.. elle est allé.. Au premier étage .. c'est ça ?.. ”

Lilith hocha la tête en lançant un regard fixe à l’escalier qu’on distinguait à travers la porte battante qui menait à ce qui paraissait être un petit salon, aussi usé que le reste.
Pas à pas, les muscles tendus, ils commencèrent à progresser doucement à travers l’intérieur du bâtiment. La petite albinos ne savait pas si c’était son imagination qui lui jouait des tours, mais elle avait l’impression d’entendre des bruits inquiétant dans toute la maison comme si celle ci avait prit vie, réveillée par les impudents intrus.
Elle avait aussi la désagréable sensation qu’on les épiais, mais à chaque fois qu’elle tournait la tête de tous les cotés, il n’y avait personne... La gorge serrée, elle prit tout les soins du monde à garder le même rythme de pas qu’Ethan et à rester près de lui, espérant dans son imagination panique que l’étage ne les mènerait pas vers une pièce grise…
Pour se donner une contenance et briser le silence qui, pour une fois, l’angoissait plus qu’il ne la calmait, elle demanda à son aîné :

“ D… Dis Et..than, ils sont com… comment dans ta famille ? Tu… tu viens d’une famille de sorciers ? Tu.. as beaucoup de frères et soeurs ? “

Laisser libre cours à sa curiosité lui permettait de penser à autre chose qu’à l’ambiance pensante de la maison. Et puis elle se demandait vraiment à quoi pouvait ressembler une famille de sorciers. Ou une famille tout court remarque.
Malgré sa voix tremblante, elle lança un regard emplit d’intérêt au jeune homme.
Le temps que celui ci réponde, ils étaient arrivés devant l’escalier qui montait à l’étage. Ce dernier semblait les appeler et cette impression fit de nouveau frissonner Lilith qui se mit même à regretter la bruyante et stressante Grande Salle aux heures des repas.
Ne voulant tout de même pas montrer sa crainte et garder sa détermination, elle se redressa et serra avec volonté la main de son camarade, empoignant fermement de l’autre sa sacoche, étreignant contre elle le violon qui se trouvait à l’intérieur pour se rassurer.
Cette fois, plus de retour en arrière.

Avant de lui offrir sa réponse et de parler de sa famille, Ethan avança un pied et “testa” l’escalier, appuyant dessus plusieurs fois. L’escalier grinça comme le reste, mais pas assez pour prouver une certaine fragilité. Puis, courageusement, il s’engagea le premier dans les marches qui menaient au premier étage. En essayant de contenir son angoisse, Lilith le suivi sans lui lâcher la main. Cela devait rendre sa progression plus difficile, mais rompre ce contact rassurant dans cette situation était au dessus des forces de la fillette.
Pendant l'ascension, Ethan consentit enfin à répondre à ses questions. Autant apaisée par le son de sa voix que captivée par ses paroles, Lilith l’écouta avec attention parler de ses parents, de ses deux soeurs et de ses trois frères. Dans sa tête, son imagination commença à former des images au fil des descriptions du jeune homme. La famille d’Ethan paraissait vraiment extraordinaire et Lilith sentit une pointe d’envie inattendue s’éveiller en son coeur. Ce devait être vraiment incroyable d’être dans une famille aussi nombreuse, entouré d’autant de frères et soeurs. Et en écoutant son aîné de Poufsouffle parler avec tant de joie de son rôle de grand frère envers les deux plus jeunes, la fillette en vint à se demander avec curiosité quelle genre de grande soeur elle aurait elle même fait.
Le discours de son compagnon eut en tout cas l’avantage de lui faire oublier un instant son angoisse. Elle ne se rendit d’ailleurs compte qu’ils étaient arrivés sur le palier du premier étage que lorsque celui se remit à craquer sous ses bottes. Lilith lança un regard alentour, un petit peu moins craintive. Sans autre “monstre” que les grincements et les toiles d’araignées pour les effrayer, elle commençait doucement à s’habituer à l’ambiance étrange de la maison grâce à la présence de son compagnon. Même si elle avait toujours cette désagréable sensation qu’ils étaient épiés.
Lorsqu’elle reporta ses yeux sur Ethan, celui ci lui adressa un sourire encourageant. La petite albinos lui rendit timidement puis scruta les alentours. Ils étaient dans une sorte de grand couloir sombre. Autour d’eux, elle distinguait vaguement dans la pénombre des tableaux éventrés accrochés aux murs et les silhouettes d’une série de portes alignées sur la droite. Laquelle choisir ? Elle ne se souvenait plus exactement où le hibou était entré…
La voix d’Ethan la sortit de ses réflexion :

“ Et toi ? Elle est comment ta famille  ? ”

La question se déversa dans l’esprit de la fillette comme une vague d’eau gelée. Elle sentit une étrange sensation lui tordre le coeur.
Elle est comment ta famille ?
Lilith baissa doucement la tête, cachant ses yeux dans l’obscurité de ses mèches de cheveux entremêlées. Elle mit quelques secondes à répondre, suivant machinalement le jeune homme qui progressait prudemment dans le couloir. Finalement, après un court silence, elle finit par retrouver la parole. Sa voix, étrangement neutre par rapport à avant, s’éleva entre eux dans un chuchotement.

“ J’ai… pas de famille… je crois. Maman disait que papa est mort un peu après ma naissance alors… y a que moi. ”

Elle se retint de rajouter l’évidence qui frappa son esprit, la faisant frissonner : elle était seule.
Cette pensée lui tordit davantage le coeur et elle se mura de nouveau dans le silence. Celui ne dura néanmoins pas et, soudain, comme si elle n’avait rien dit, Lilith s’immobilisa et, lâchant doucement la main d’Ethan, se mit à fouiller dans sa sacoche. Après quelques secondes, elle en sortit alors une tige de bois fine : sa baguette.
Elle avait soudain eu une idée. D’un geste mal-assuré, elle leva l’objet devant elle à la verticale et, prenant une inspiration, souffla alors la formule qu’elle avait apprise deux semaine plus tôt :

“ L...Lumos. ”

La baguette grésilla mais il ne se passa rien. Fronçant les sourcils de concentration et de déception, Lilith fixa la tige de bois avec intensité et prononça plus distinctement :

“ Lumos ! “

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