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 [1944 - Début Janvier] Une année flambant neuve

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Winifred Webb
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MessageSujet: [1944 - Début Janvier] Une année flambant neuve   [1944 - Début Janvier] Une année flambant neuve Icon_minitimeMar 29 Déc - 19:56

Il n'avait fallu que quelques heures de pluie en ce début d'année 1944 pour que les rues de Pré-au-lard soient lavées de toutes traces de neige. Du joli duvet blanc qui avait recouvert les pavés des rues jusqu'aux tuiles des toits, il ne restait plus rien. La météo capricieuse, dont très peu de jours de neige, avait jusque là laissé croire à un hiver plutôt sec, mais les archives parlantes du village en étaient à remettre en question leurs pronostiques pour la suite de la saison. À l'intérieur des maisons, on s'occupait à remplir le poêle, tandis que dans les commerces, on s'employait surtout à se désoler que la pluie retienne les clients.

Dans les cuisines du Magellan, mamie Winifred avait quant à elle autre chose à faire que de pleurer sur la disparition des jardins de givre qui embellissaient jusqu'à ce même matin les fenêtres de son établissement. Pour tout dire, elle s'activait depuis plusieurs heures à préparer son fameux ragoût de mouton à la guiness tout en pétrissant la pâte à pain, pour le lendemain, et en supervisant l'épluchage des pommes de terre, qui seraient ensuite bouillies, tranchées, fourrées ou rissolées, selon les commandes.

Ces derniers jours, la taverne avait résonné des grands airs de Verdi, mais l'italien de Winifred étant pour ainsi dire une atrocité, les glorieux La vita... che importa? È il racconto d'un povero idiota ; Vento e suono che nulla dinota ! se retrouvaient travestis au point d'être méconnaissables. Ça n'avait aucune importance, disait Winifred à qui osait le lui faire remarquer, ce qui importait, c'était de mettre du coeur à l'ouvrage, ajoutait-elle ensuite en posant la main sur son poitrail. Ce jour-là, peut-être pour combattre la grisaille de la pluie, la patronne s'époumonait sur la noce de Figaro, saluant les rares clients d'un tonitruant Ah, bravo Figaro! Bravo, bravissimo! Bravo !

Passé midi, l'odeur du ragoût mijotant sur le feu de cheminée embaumait la taverne tout entière. Après le déjeuner, où elle s'était attablée avec un vieux sorcier habitué de la place, la vieille femme avait repris son tablier et son tour de chant, cette fois pour préparer les galettes d'avoine pour accompagner le ragoût. Elle s'arrêta cependant net après la deuxième fournée quand elle vit quelle silhouette se découpait dans la porte d'entrée.

« EDEN! Comme je suis heureuse de vous voir! » fit-elle en se précipitant vers sa jeune amie. Elle ne se retourna qu'une fois pour lancer à un garçon de cuisine : « Sors une de mes meilleures bouteilles de scotch ale! » puis reporte toute son attention en souriant vers Eden. « Bonne année 44, my dear! »
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MessageSujet: Re: [1944 - Début Janvier] Une année flambant neuve   [1944 - Début Janvier] Une année flambant neuve Icon_minitimeVen 1 Jan - 19:05

Il y avait peu de personnes qui trouvaient grâce aux yeux d'Eden. A partir du moment où on s'éloignait de la famille, on tombait forcément un peu en disgrâce. Les Sangs-Purs et leur attitude coincée et hautaine l'insupportaient - alors même qu'elle partageait souvent leurs idées - et ne l'aimaient pas beaucoup non plus. Elle était trop fantasque, trop imprévisible et trop indépendante. Personne ne pouvait la contrôler et tout le monde détestait ça. Les Sangs-Mêlés, eux, étaient à ses yeux inférieurs. Bien sûr, elle avait toujours été plus souple sur cette question, et cela allait de mieux en mieux. Sa meilleure amie depuis Poudlard était une Vampire et son amant, qui lui avait donné un fils, était un Loup Garou. Son garde du corps de même. Son cousin était un sale traitre d'Auror. Autant dire qu'elle relativisait beaucoup ses anciennes allégations.

Sa famille se résumait maintenant à sa fille, son fils, et la fille de son amant emprisonné, dont elle prenait grand soin. Son cousin ne remettait étrangement plus les pieds chez elle, et son garde du corps - bien qu'elle l'aime beaucoup - ne représentait à ses yeux pas la même chose que sa petite famille. Ses parents étaient décédés depuis tant de temps maintenant qu'elle n'avait jamais vraiment eu l'occasion de profiter de leurs conseils. Elle avait toujours fait tout, toute seule, et son esprit était fermement accroché à l'idée d'indépendance et de liberté. Elle travaillait parfois bien qu'elle n'en ait jamais vraiment besoin, mais ce n'était que pour le plaisir de se divertir. Cela faisait une année entière qu'elle n'avait pas cherché un travail, à vrai dire. Depuis noel dernier, elle avait été bien trop débordée par d'autres sujets.

Mais maintenant, Pearl était morte. Virgile était retenu loin d'elle. Les filles étaient à Poudlard et Zachary se cachait au Ministère. Arthur était en prison et William se planquait dans sa cave. Eden était plus seule que jamais, et plus perdue que jamais. Dans cette situation, il y avait toujours quelque chose d'important à faire. Une personne importante à aller voir. Winifred Webb était une Sang-Mêlée, mais qu'Eden tenait en haute estime. Elle la respectait pour son courage et sa détermination, et elles partageaient toutes deux quelques points communs, comme par exemple leur scolarité dans la maison Serpentard. La dame était plus agée qu'elle, et Eden aimait sa compagnie. Elle était honnête et débrouillarde, et surtout, elle ne regardait jamais Eden avec mépris, quelques soient ses actes. Elle savait qu'en ces temps agités, la dame serait sans doute son appui le plus stable, et elle avait bien besoin d'être rassurée.

Elle poussa donc la porte, vêtue de noir comme depuis la mort de Pearl, serrant contre son ventre son fils Leir, petite chose de quelques semaines enveloppée dans un tissu pour le transport, qu'elle refusait de laisser seul plus d'une très courte après-midi. Il ne dormait pas, et ses yeux bleus regardaient calmement le monde qui l'entourait. Eden avait l'air fatiguée, mais elle sourit tout de même en avisant Mrs. Webb qui l'accueillait comme à son habitude.

- EDEN ! Comme je suis heureuse de vous voir !

Elle distribua quelques ordres à son garçon de cuisine, et la salua chaleureusement.

- Bonne année 44, my dear !
- Bonne année, Mrs. Webb.

Eden s'approcha d'elle, et s'installa sur une chaise confortable car elle avait un peu mal au dos. Elle relâcha lentement le tissu qui soulevait son fils pour le dégager un peu et pour qu'il ne souffre pas de la chaleur.

- J'avais quelqu'un à vous présenter...

Elle passa une main dans les petits cheveux fins de son fils, caressant sa tête qui dépassait à peine, puis elle lui remit son petit bonnet.

- Dis bonjour à Grand-Mère Webb, Leir.

Elle sourit à la dame, mais ses yeux brillaient de tristesse. Elle s'efforçait d'aller bien, mais la grand-mère la connaissait trop bien maintenant pour savoir que ce n'était qu'une façade. Il suffisait de gratter un peu pour voir la vérité : Eden était épuisée, et désespérément seule et perdue.

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Winifred Webb
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MessageSujet: Re: [1944 - Début Janvier] Une année flambant neuve   [1944 - Début Janvier] Une année flambant neuve Icon_minitimeMar 16 Fév - 2:31

Après avoir offert une franche et sonore bise à sa jeune amie, Winifred avait repris quelque peu son sens de l'accueil, le temps de nettoyer la table d'un ou deux solides coups d'un chiffon qu'elle attacha ensuite sans cérémonie à sa hanche droite... et oublia tout, jusqu'à l'existence même de sa taverne lorsque Eden souleva le pan de tissu qui dissimulait un adorable bambin aux joues potelées, au petit nez rond et au front bombé comme celui d'un chérubin.

"Oh dear, oh dear, vous avez pondu là une véritable merveille. Et quel nom charmant! Leir Valentyne, tu as une maman admirable... Asseyez-vous. Le remontant arrive."

La vieille femme savait aussi bien que n'importe quelle femme ayant accouché d'une chose braillarde et exigeante, sous ses airs d'angelot, que le travail de mère était le plus dur qui soit et le plus épuisant aussi. Elle passa la main dans le dos d'Eden pour l'inviter à s'installer avec son fils.

"Rien de tel qu'une goutte de scotch ale dans un bon thé fort du pays. THOMAS!" lança-t-elle soudain avec un soupçon d'impatience en direction des cuisines. Aussitôt apparut un frêle adolescent, pas encore tout à fait sorti de la puberté si on se fiait aux boutons qui constellaient son front et au soupçon de moustache qui garnissait sa lèvre supérieure. Il transportait maladroitement un plateau sur lequel reposait la fameuse bouteille de scotch ale et deux verres, qui tintèrent joyeusement lorsque le plateau heurta un peu trop brusquement la table.

Winifred assena une petite tape sur la main du garçon, qui se tendait vers la bouteille pour faire le service. "Retourne plutôt en cuisine nous chercher une théière bien chaude et le thé noir, tu sais lequel, et n'oublies pas le pot de lait." Le garçon fila à l'anglaise sans demander son reste, et la mamie reporta son attention sur la mère et son fils, tout sourire. Son ton se radoucit aussi complètement.

"Le pire est derrière vous, my dear. Combien d'heures dort cet adorable petit monstre?" fit-elle en attrapant le petit pied droit du monstre en question.
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