[Mi-septembre] The red carpet day

Les traînées rougeâtres des feuilles mortes, visibles depuis la tour d'astronomie, donnaient l'impression que l'été était déjà bien parti. Ce n'était que le mois de septembre, mais le soleil avait laissé sa place à un automne maussade et peu ensoleillé. Oh, Aiden n'était pas un fervent partisan du mois d'août, mais il fallait admettre que les pluies intermittentes, qui martelaient les vitres, n'étaient pas un élément qui favorisait sa bonne humeur.

Soupirant d'un air insatisfait, il s'allongea sur le sol glacé de la tour d'astronomie. Le plafond était si haut qu'il ne vit que l'obscurité, et, mal à l'aise, il se tourna, se recroquevillant. Aussi enfantin que cela pût paraître, l'obscurité lui donnait toujours l'impression d'étouffer.

La joue appuyée contre le marbre, le jeune homme soupira de nouveau, plus pour prendre une grande goulée d'air frais que pour autre chose.

Il ne se cachait pas de son travail. Non, en toute honnêteté, Aiden l'adorait. Mais lorsque tous les tableaux avaient leur toile traitée, que les sculptures ne présentaient plus aucune fissure, et que les armures ne grinçaient plus, Aiden adorait s'échapper un moment de la foule, du brouhaha incessant des jeunes élèves. Là, perché sur la tour d'astronomie, il prenait alors un plaisir sans pareil à déguster quelques patacitrouilles et à boire du thé, un Lapsang Souchong dont il n'avait jamais eu les moyens de s'offrir.

Cependant, c'était un jour différent. Point de sucreries, point de boissons chaudes, cette courte heure de pause était dédiée à un sortilège dont Aiden connaissait par cœur les mouvements, les paroles, les intonations. Il n'avait pas l'habitude de l'utiliser –après tout, pourquoi un simple restaurateur d’œuvres magiques conjurerait-il ce sort ?; et c'était une bonne chose. Mais lorsqu'il était seul et dans une pièce peu éclairée, à la place d'un Lumos en bonne et du forme, Aiden préférait voir son Patronus défiler.

Alors, toujours étalé au sol, il étendit son bras vers le plafond qui le mettait mal à l'aise quelques instants auparavant, et marmonna un « Expecto Patronum » ; une image d'un de ses anniversaires en tête. Voir son Patronus apparaître, illuminant la charpente de la tour, déambuler autour de lui dans un amas argenté, lui procurait un certain apaisement.

Mais Aiden se rappela, en observant depuis le sol l'anaconda fantomatique hisser et disparaître derrière un pilier, de ces années où il était lui-même un élève, où nombre de ses camarades lui demandèrent, étonné, pourquoi n'était-il pas Serpentard, avant de se confondre en excuses. Reniflant avec dédain, Aiden se souvint qu'il ne répondait jamais. Il se contentait de les ignorer avant de partir, visage impassible mais son esprit embrouillé.

Il se souvint qu'au début, il aurait bien voulu être un Serpentard. Être aussi craint que respecté. Être riche et avoir un statut. Au moins, il n'aurait pas été le « Sang-de-Bourbe » que certains méprisaient.  Mais c'était une évidence qu'Aiden aurait été un bien piètre Serpentard. Trop juste, trop droit, il n'était pas une personne qui porterait fièrement du vert émeraude et de l'argent étincelant. Et c'était largement mieux ainsi.

Le Patronus disparu, Aiden resta encore un instant avant de vérifier sa vielle montre achetée au Chemin de Traverse il y a quelques années –quelle idée de rendre les technologies moldues inutilisables ici ! ; et se rendit compte, dépité, qu'il était l'heure de partir.

Aiden, tout en ramassant ses affaires, entendit la porte s'ouvrir en un grincement sonore. Il releva la tête en un éclair, essayant de distinguer la figure dessinée en ombre chinoise devant lui. Quand il n'y parvint pas, ses yeux s'étant accoutumés à la semi-obscurité ambiante, le jeune homme préféra prévenir, d'un ton nonchalant ; « Je pense pas que ce soit autorisé aux élèves de venir en dehors des cours, hm ? ».

Mais peut-être était-ce autorisé, maintenant ? Nom de Dieu, les règles étaient beaucoup moins laxistes à son époque.