[[Mi Février]] Une Nouvelle Accablante [[Angelica / Naoise]]

Cela faisait maintenant presque un mois que je me sentais bizarre. Chaque matin en me levant, je devais retenir cette étrange sensation que mon repas de la veille ne voulait pas rester en place. Ma poitrine me faisait mal également dès que je bougeais un peu ou que mes vêtements étaient un peu trop serrés. Au début, je n'y prêtais aucune attention, mais petit à petit, ces petites nuisances devinrent régulières et plutôt gênante. Mes amies me commencèrent même à me taquiner un peu, prétendant que je devais probablement être enceinte. C'était juste des plaisanteries et j'en riais avec elles. Mais le fait que cela se répétait plusieurs fois par semaine, puis tous les jours finit par ne m'arracher que des rires jaunes lors de nos discussions.

C'est vers fin-janvier, début février que je commençais à réellement douter de ma condition. Je n'osais en parler à personne d'autres, faisant comme si tout cela était du passé maintenant, je ne pouvais pas vraiment me permettre de faire circuler une rumeur sur une grossesse potentielle. J'avais bien en tête un évènement qui pouvait être relaté à cet état de santé, mais je m'y refusais catégoriquement. C'était possible, bien sûr, c'était même probable, mais l'idée en elle-même était effrayante au possible. Non pas parce qu'elle pouvait signifier, mais par les conséquences qu'elle aurait sur ma vie. N'en tenant plus, je me réfugiais dans la salle de Divination, m'y faufilant discrètement à l'abri du regard de notre professeur, même si celui-ci, s'il était réellement ce qu'il disait être, devait probablement être au courant. Empruntant son matériel, je tirais une première fois les cartes, espérant y lire un passé qui pourrait me conforter dans l'idée que je me trompais. Une fois fait, ce fut d'une main tremblante que je pris une boule de cristal et y plongea mon regard.

Ce don de voyance, que ma mère était persuadée m'avoir octroyé en me nommant Cassandre, pouvait être une plaie par moment, surtout lorsque je ne m'y attendais pas. Mais dans une telle situation, il était plus qu'utile, même s'il ne me montrait que ce qu'il y avait à voir et non ce que je voulais. Qu'il s'agisse des cartes ou de la boule de cristal, l'un comme l'autre me confirmèrent mes craintes. Une crampe me pris alors soudainement à l'estomac, bien différentes de celles qui me réveillaient chaque matin. Rangeant avec soin et lenteur les affaires que j'avais déplacées, je sortis de la salle, tout aussi discrètement que j'y en étais entré. Par la suite, je continuai ma vie scolaire comme si de rien n'était, suivant les cours et mes amis comme toujours, mais mon esprit était ailleurs, loin ailleurs. Une semaine passa, puis une seconde jusqu'à ce que je ne puisse plus tenir. C'est d'un pas hésitant et après avoir attendu patiemment que les cours aient commencé, de manière à ne croiser personne ou tout du moins le moins de monde possible, que je quittais la salle commune pour me rendre à l'infirmerie. Là-bas, je vis l'infirmière en train de s'affairer aussi frappais-je doucement à la porte.

-"Mademoiselle Lecter ? Est-ce que je peux vous parler ?"

Hésitant un peu, je refermais toutefois la porte de l'infirmerie, après m'être assurée que la salle était vide. Pour le coup, j'avais besoin d'intimité.

-"Je crois que j'ai un problème…. Je ne sais pas trop à qui en parler…"

Menant le geste à la parole, je portais une main à mon ventre en baissant les yeux, ne sachant si je devais sourire ou non, espérant toutefois qu'elle comprenne le message. Même si la réalité était ainsi, je ne pouvais encore me résoudre à prononcer ces mots, un peu comme si je craignais que cela n'empire la situation.

Amicalement, un peu comme une mère viendrait réconforter son enfant après une dure journée, l'infirmière vint s'occuper de moi. Sur le moment, malgré ma gêne et mon déconfort au vu de la situation, je ne pus m'empêcher d'éprouver un certain agacement. Je n'étais pas un de ces élèves qui s'étaient fait une égratignure après avoir raté un sort ou une potion. Je n'avais pas besoin d'être réconfortée. J'avais besoin de quelqu'un à qui parler, pour faire le point. M'indiquant un lit, je suivais cependant ses indications, il fallait bien qu'elle vérifie avant de faire quoi que ce soit. M'approchant du lit, je me débarrassais de ma robe de sorcier, plus encombrante qu'autre chose, il fallait bien l'avouer, et la posa sur la chaise la plus proche avant  de m'allonger sur lit. Un peu gênée, malgré l'absence de toute autre personne dans la pièce, je défis ma chemise, laissa mon torse à découvert. Inconsciemment, je due me faire violence pour ne pas me couvrir la poitrine. Angelica était une femme, nul doute la dessus, mais il n'en restait pas moins embarrassant de se retrouver en soutien-gorge devant une autre.

-"J'ai… j'ai tiré les cartes, j'ai lu le marc de café et j'ai même … j'ai même sondé la boule de cristal… Le résultat reste le même à chaque fois …"  

Doucement, mais avec conviction, je retirais ma main de celle d'Angelica. Il ne m'était pas difficile de comprendre qu'elle se voulait douce et maternelle, cherchant à me conforter dans une situation difficile qu'elle n'avait probablement jamais vue auparavant dans cette école. Mais je n'avais nul besoin d'être confortée. Ce que j'avais fait, je ne le regrettais pas, c'était ma décision, en quelque sorte. Et puis j'étais adulte ! Même si cela ne faisait qu'un peu plus de deux mois, j'étais quand même considérée comme adulte dans le monde des sorciers. Je me tus cependant, attendant qu'Angelica finisse de m'ausculter pour ne pas la déranger plus que nécessaire. Je restais néanmoins persuadée que cela était inutile. Mes dons de divinations étaient suffisamment développés pour ce genre de petite voyance du dimanche. J'étais enceinte, c'était un fait, et je savais parfaitement de qui.

-"Je n'ai eu qu'une seule…. Je ne l'ai fait qu'une seule fois. Donc ça ne peut-être que lui, n'est-ce pas ?"

C'était là que les choses allaient se compliquer un peu plus qu'elles ne l'étaient déjà.

-"Mme Lecter… Pensez-vous qu'on devrait le prévenir ? Je veux dire… Il est le père, non ?", puis comme une épiphanie, je me tournais soudainement vers l'infirmière,"Mes parents ! Il ne faut pas leur dire ! S'il vous plait !"

Sans doute qu'à ce moment, je ressemblais à l'un de ses chatons faisant les yeux doux à leur maître. Mais je ne pouvais pas faire autrement que de la supplier. Si les autres venaient à l'apprendre, j'en mourrais de honte !

-"S'il vous plait, personne d'autre ne doit être au courant !"

Les rumeurs se répandaient rapidement dans les écoles, celle-ci ne pouvait pas faire exception. Si quelqu'un apprenait que j'étais enceinte d'un homme auquel je n'étais pas marié, sans même avoir fini ma scolarité, probablement que ma famille irait jusqu'à me déshérité pour ne pas perdre leur honneur. Et qu'en serait-il de mon futur ? Pourrais-je travailler avec un enfant en bas âge ? Mais je ne pouvais m'en débarrasser ainsi, c'était un être vivant après tout !

-"Naoise… Naoise Cailean, c'est lui le père…"